Des bouteilles pleines de vies

Partager

Les beaux verres à vin me font un petit quelque chose. Dans la continuité du bien boire, on joue de leur forme pour étaler les attraits du vin. Les verres tulipe, idéaux pour la dégustation d’un effervescent, s’entrechoquent à l’occasion d’une fête, ou célèbrent les coquillettes au jambon du mardi. À chacun ses petits bonheurs. Puis la bouteille terminée s’en va rejoindre la benne à verre. Issue de la tradition des arts du feu, la flûte d’Alsace avec son surplus d’élégance n’y échappe pas. Du côté de Lutzelbourg, l’atelier S’Glàs leur offre une retraite dorée.

Situé dans une ancienne usine d’agrafes, le Pôle Konzett est un lieu où cohabitent différents créateurs et entrepreneurs. C’est dans cet écosystème que le talent de Maya Thomas trouve ses aises depuis août 2021. Parce qu’on vit dans une poubelle qui grandit chaque jour un peu plus, l’envie de faire quelque chose qui a du sens anime la Strasbourgeoise de coeur.

Maya aime le verre. L’objet certes, mais surtout la matière, qu’elle recycle avec habileté. La partie supérieure des bouteilles est découpée, passée au four, puis aplatie. Les pièces ainsi profilées s’assemblent et composent des vitraux. La partie inférieure trouve écho dans les arts de la table. La matière s’affiche alors en verres, bocaux, et carafes.

Feuille jaune, marron glacé, chêne…à l’atelier S’Glàs, les couleurs sont automnales. Les flûtes au teint chlorophylle – celles qui fricotent avec le kitsch – prennent des airs sobres, minimalistes, et design. Véritables phénix du folklore Alsacien.

Un système de récupération de bouteilles, mis en place avec une poignée de professionnels, permet d’obtenir une matière première ayant déjà quelques gouttes de vécu. Les flacons sont ensuite coupés à l’aide d’une scie à eau à lame diamantée. C’est que la dureté du verre appelle les mêmes outils que ceux des tailleurs de pierre. Différents ponçages permettent, notamment, de sécuriser le toucher de bouche des verres. L’eau accompagne les gestes précis et artistiques de l’artisane verrière. Le polissage, la gravure, le nettoyage, puis l’emballage précèdent la commercialisation.

À l’approche de Noël, les commandes s’accumulent. Les créations défilent déjà sur quelques tables strasbourgeoises, dont l’hôtel Léonor et le restaurant La Fignette. En cette fin d’année, je ferai une infidélité à mon amour pour les verres à pied en allant zieuter les réalisations de l’Atelier S’Glàs. Maya, elle, travaille le verre vide, mais apprécie son verre paré du cépage Auxerrois.

 

 

à lire également :