Édito // Vertiges
« Lire, c’est oser le vertige. On peut lire, comme on s’incline, révérencieux, ébloui par la fulgurance d’un bel esprit. Aveuglément ! Qui ne me guide pas me perd ! Or, je veux seulement trouver mon chemin. Qu’on nous laisse donc un œil ouvert ! »
Le Vieil Homme sur la barque (2010), Fatou Diome
Les inégalités, le réchauffement climatique, l’avènement de l’intelligence artificielle, le refus de vieillir et même de mourir, le terrorisme, l’hyper-connexion, la fin des religions, la corruption… ce n’est pas franchement le vertige de l’amour auquel nous invite l’époque, ces derniers temps.
C’est en partie pour tenter de retrouver notre équilibre, bigrement mis à mal depuis l’émergence de l’ère du numérique, que Yasmina Khouaidjia et son équipe de la Biennale d’art contemporain de Strasbourg ont voulu donner un espace d’expression aux artistes/hackers qui seront présents sur ce premier opus intitulé « Touch me ».
Souvent les artistes nous permettent d’accéder à des niveaux de conscience qui nous autorisent à mieux saisir la complexité de notre quotidien qui est devenue une source infinie de maux, de malaises, de vertiges.
La solitude pour ceux qui se sentent exclus de ce nouveau monde en devenir, mais aussi pour ceux qui se leurrent en ayant tant d’amis sur les réseaux sociaux et ne sont plus capables de tisser des liens intimes et forts avec de vrais gens, dans la vraie vie ; voilà le grand vertige auquel la jeune génération va devoir se confronter.
Elle semble, bien plus que les précédentes, ne plus attendre de solutions toutes faites, notamment quand elles proviennent du pouvoir politique (voir notre dossier sur les 18-25 ans dans ce numéro).
Les arts, que ce soit la musique, la littérature, le cinéma ou bien encore les arts plastiques sont parfois pour elle, le chemin le plus visionnaire, celui qui va forger ses nouveaux rêves et permettre l’émergence d’une société plus juste, plus aimante et plus bienveillante.
Or Norme vous propose en cette fin d’année, de partager le seul vertige qui vaille, celui vers lequel nous entraîne l’amour, la littérature, les œuvres d’art mais aussi l’imagination et la créativité des femmes et des hommes qui jamais ne se résignent, et inlassablement ne cessent de créer.
Très bonnes fêtes à toutes et tous, et un grand merci pour votre fidélité et vos encouragements enthousiastes tout au long de cette année.
Patrick Adler
Directeur de la publication