Fondation Cartier pour l’art contemporain : Damien Hirst et ses Cerisiers en fleurs
– Article paru dans ORNORME n°43, SPLENDEURS –
Dans les petites chapelles de l’art contemporain, il fait partie de ces artistes renommés vite accusés, une fois leur succès acquis, de servir et resservir à satiété la sempiternelle même recette commerciale. Au risque d’apparaître comme des benêts, on va essayer de vous faire partager notre conviction : Damien Hirst est bel et bien un artiste majeur de notre époque, travaillant aussi bien la sculpture que l’installation, le dessin et, bien sûr, la peinture. La Fondation Cartier lui offre sa première exposition institutionnelle en France et cette exposition se révèle immanquable…
Il a fallu pas moins de trois ans à Damien Hirst pour terminer cette incroyable réalisation de 107 toiles, toutes de très grands formats, que comprend la série Cerisiers en fleurs, commencée après l’incroyable projet de sculpture Treasures from the Wreck of the Unbelievable qui l’occupa pendant une décennie avant d’être révélé au printemps 2017 au Palais Grassi et à la Punta Della Dognana, les deux sites de François Pinault à Venise, dans le cadre de la Biennale 2017.
« Les Cerisiers en fleurs parlent de beauté, de vie et de mort. Elles (les toiles) sont excessives – presque vulgaires. Comme Jackson Pollock abimé par l’amour. Elles sont ornementales, mais peintes d’après nature. Elles évoquent le désir et la manière dont on appréhende les choses qui nous entourent et ce qu’on en fait, mais elles montrent aussi l’incroyable et éphémère beauté d’un arbre en fleurs dans un ciel sans nuages. C’était jouissif de travailler sur ces toiles, et de me perdre entièrement dans la couleur et la matière, à l’atelier. Les Cerisiers en fleurs sont tape-à-l’œil, désordonnées et fragiles, et grâce à elles, je me suis éloigné du minimalisme pour revenir avec enthousiasme à la spontanéité du geste pictural ». Ces mots de l’artiste lui-même figurent sur la page dédiée à sa superbe série sur son site.
La dernière de ses 107 toiles a été peinte en novembre 2020, c’est-à-dire au sortir du long confinement qui avait débuté le 20 mars précédent. « La pandémie m’a permis de vivre avec mes peintures et de prendre le temps de les contempler, jusqu’à ce que je sois certain qu’elles étaient toutes terminées » déclare Damien Hirst dans le film 360°, spécialement réalisé pour l’exposition à la Fondation Cartier.
Il ne faut surtout pas se laisser bluffer par les photos des toiles (même les plus léchées) parues dans les magazines afin de promouvoir l’expo parisienne. Inévitablement, même sur papier glacé, elles ont un petit côté wallpaper qui ne peut que nuire à la perception de l’extraordinaire travail qu’on repère au premier coup d’œil quand on visite l’exposition de visu. Surtout quand, sur le coup de onze heures le matin, début novembre dernier, le soleil rasant d’hiver vient frapper les toiles de côté, pendant à peine une poignée de minutes. Cette extraordinaire et inattendue lumière latérale révèle alors idéalement le travail de l’artiste, qui mêle touches épaisses et projections de peintures, une fantastique sarabande qui fait référence tant à l’impressionnisme et au pointillisme qu’à l’action painting. On reste coi quand on mesure l’incroyable somme de travail, au vu du gigantisme de la plupart des 107 toiles de la série. Y voir à la fois un détournement et un hommage aux grands mouvements artistiques de la fin du XIXe siècle et de la première moitié du XXe provoque une émotion assez incroyable elle aussi…
Pas de doute, les Cerisiers en fleurs s’inscrivent bien dans les réflexions picturales que Damien Hirst mène depuis les premiers pas de sa carrière (il est assez frappant d’aller revoir sur le net ses fameux Sports Paintings de la fin des années 80 juste après avoir visité l’expo à la Fondation Cartier. On comprend immédiatement la filiation…).
Alors oui, si vous êtes à Paris en cette fin d’année, il ne faut pas rater l’expo de la Fondation Cartier. Pour vous donner encore plus envie, vous pouvez visionner sur internet le film documentaire réalisé spécialement pour l’exposition parisienne, en flashant le QR code ci-dessous.
Une fois sur place (si vous y êtes en fin de matinée et si… le soleil veut bien être de la partie), arrangez-vous pour vous situer dans la grande salle de droite au rez-de-chaussée. La toile est la n°10 de l’expo, elle se nomme Wonderful World Blossom et ces instants fugaces révèlent toute la magie du travail de cet artiste majeur de l’art contemporain…
FONDATION CARTIER
POUR L’ART CONTEMPORAIN
261 boulevard Raspail 75014 Paris
Les Cerisiers en fleurs – Damien Hirst Jusqu’au 2 janvier 2022
Accès :
Métro Station Raspail (Ligne 4 ou 6)
Ouvert tous les jours sauf le lundi de 11 à 20h (le mardi jusqu’à 22h)
Tarifs :
Plein tarif : 9€
Tarif spécial seniors : 5€
Gratuit pour les moins de 18 ans.
Réservation en ligne : site internet