Jeanne Barseghian, Maire de Strasbourg « C’est le plus grand défi auquel j’ai eu à faire face dans ma vie »

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– Grand entretien publié dans Or Norme n°38-

Rencontrer Jeanne Barseghian, maire de Strasbourg, pour cet entretien convenu dès son élection le 28 juin dernier aura permis d’enregistrer cinq sur cinq les premiers symboles ostentatoires d’un changement parfaitement assumé par la nouvelle équipe : exit les bureaux climatisés du 9ème étage du centre administratif et bienvenue dans les espaces quasi lambda du premier étage. Le bureau de Jeanne Barseghian est dans un angle du bâtiment et bénéficie d’un maximum de lumière via de larges baies vitrées, avec la conséquence d’une température surchauffée en ces derniers jours de la canicule d’août dernier. Car, bien sûr, il n’y a pas la climatisation, autre signe évident lui aussi… Mais ce qui ne change pas, c’est la montagne de parapheurs qui attend la signature du premier magistrat… Parfaitement détendue et très à l’aise, la nouvelle maire de Strasbourg est manifestement ravie de se prêter au jeu de nos questions pour un entretien d’une heure et quinze minutes dont les horaires du créneau auront été finalement respectés quasiment à la minute près…

Or Norme. Deux mois après votre élection, on a juste envie de vous demander ce qui s’est passé depuis le 28 juin dernier, depuis votre sourire éclatant devant les caméras sur la terrasse du restaurant du TNS au soir de la victoire, jusqu’à ce 13 août, date à laquelle vous nous recevez. Est-ce que ces premières 11 semaines dans ce fauteuil se sont passées comme vous l’aviez imaginé ?
« Oui et non, en fait. Pendant toute la période de confinement entre les deux tours, il y avait eu un très gros travail de préparation, malgré que j’aie été non opérationnelle pendant plus d’un mois puisque j’ai été atteinte par le Covid- 19. Ce fut d’ailleurs pour moi un moment pas facile du tout, qui m’a pas mal secouée…

©Abdesslam Mirdass

Or Norme. Puisque vous en parlez, avez-vous craint à un certain moment que la maladie vous empêche d’atteindre votre but ?
Honnêtement oui, car quand les choses se sont accélérées et qu’il est apparu que la date du second tour se profilait pour la fin juin, j’étais encore en convalescence et pas très en forme. Je me suis demandée si je parviendrais à être rétablie et en pleine possession de mes moyens pour mener la campagne du second tour. J’ai eu de la chance sur ce coup-là : quand la date précise a été officialisée pour le 28 juin, j’étais alors quasiment remise. Ceci dit, pour le reste de mon équipe, ce fut un moment de suspension et de silence certes, mais aussi, paradoxalement, au bout de quelques semaines, de vrais moments de créativité qui se sont nourris de toutes ces réflexions engendrées par le confine- ment et tout ce qu’il nous avait appris. Au final, c’est une toute nouvelle dynamique qui s’est ainsi mise en place. Et pendant ce temps-là, on a vraiment travaillé sur l’après, sur les premiers pas du mandat, en cas de victoire. Entendons- nous bien, je n’avais pas la moindre certitude de gagner cette élection, mais je pensais que c’était possible. Sincèrement, je peux vous dire que je pensais que ce serait beaucoup, beaucoup plus serré que ce ne le fut finalement. Donc oui, on avait un peu balisé les première étapes, l’installation, la constitution de l’équipe des adjoints et adjointes, les premiers repères en terme de gouvernance et bien sûr, les toutes premières mesures, symboliques au départ et complètement opérationnelles ensuite.
Malgré tout, on a eu beaucoup d’urgences à gérer. Même pas installés, on était déjà obligés de tout faire en même temps car nous avions une première date importante, un conseil municipal que nous avons voulu réunir fin juillet, pour voter un budget supplémentaire devant permettre d’engager certaines mesures d’urgence. En quelques semaines, nous avons abattu un travail acharné, avec une organisation loin d’être stabilisée. Elle ne le sera que début septembre…

Or Norme. Avec notamment en ce qui vous concerne directement l’absence d’un directeur de cabinet qui est un rouage essentiel pour la maire d’une grande ville… Ce ne sera manifestement pas quelqu’un issu du crû local, dit-on…

Effectivement. Nous sommes en cours de recrutement pour ce poste. Comme il y a pas mal de changements dans les cabinets des maires des grandes villes de France, une certaine mobilité est en train de s’organiser. Ça a un petit côté cuisine back office (rires) mais en fait on a besoin de toute cette organisation autour de nous pour bien fonctionner. Cette personne sera donc à mes côtés ici au premier étage, tout près également de Pia Imbs, la présidente de l’Eurométropole et des deux vice-présidentes, présidentes déléguées (outre Jeanne Barseghian elle- même, Danièle Dambach, la maire de Schiltigheim – ndlr) et la direction générale des services. Bien sûr, notre présence à ce premier étage est symbolique mais elle reflète aussi notre vision du partage du pouvoir, celle d’être plus accessible et plus en prise avec les réalités du terrain et au contact avec les habitantes et les habitants…

Or Norme. Comment mesurez-vous tout le chemin que vous avez parcouru ? Manifestement, malgré le fait que vous ayez été élue comme conseillère municipale durant les six ans de la mandature précédente, vous ne donnez pas l’impression de quelqu’un qui avait programmé de A à Z son accession à la fonction de maire de Strasbourg. On connait un peu l’histoire de votre arrivée au sein du Labo citoyen mis en place il y a plus de deux ans par Syamak Agha Babaei, puis l’émergence de cette idée que vous seriez tête de liste…

En fait, il y a la petite histoire mais aussi la grande histoire. Il y a certes mon parcours personnel mais il s’inscrit aussi au sein d’un mouvement de fond global qui est un véritable mouvement sociétal au niveau mondial. Effectivement il y a deux ou trois ans, je ne me suis nullement positionnée pour conduire une liste à l’élection municipale de 2020 d’une des plus grandes villes de France. Mon ambition était simplement de faire bouger les lignes et d’agir au quotidien dans ce sens, en tant que praticienne de l’environnement puisque je travaille depuis quinze ans sur cette théma- tique-là. J’ai ainsi toujours souhaité pouvoir apporter ma pierre à l’édifice pour améliorer la vie des gens, à l’échelle la plus grande possible. Alors, oui, il y a eu un très grand chemin parcouru, tant sur le plan indi- viduel que collectif. En ce qui me concerne, je ne me situais nullement dans cette perspective de conduire une liste : je ne dis pas qu’on n’en avait jamais parlé, je savais que certaines personnes y pensaient pour moi, vous avez raison de l’évoquer, mais ma décision personnelle définitive, je ne l’ai prise qu’en juillet de l’année passée, il y a un an donc. J’avais prévenu tout le monde qu’il fallait me laisser réfléchir quelques mois afin que je sois absolument certaine et déterminée…

Or Norme. Revenons un instant sur le dénouement du scénario électoral du second tour. Il y a un point qui concerne quasiment l’ensemble des maires élus : le faible nombre de voix obtenues par 13 rapport à l’ensemble du corps électoral, en raison, évidemment, de cette forte abstention totalement inédite au niveau des élections municipales. À Strasbourg, un peu plus de 23 000 électeurs ont glissé un bulletin à votre nom dans les urnes du second tour, à rapprocher des plus de 143 000 électeurs inscrits. Vous avez donc été élue par à peine 15% du corps électoral. C’est encore pire dans d’autres endroits, à Mulhouse notamment où votre collègue a été élue par à peine plus de 9% des inscrits. Il y a là, objectivement, un vrai problème de légitimité des maires élus en juin 2020. Comment comptez-vous agir pour tenter de recoudre ce lien très distendu entre les citoyens et les élus municipaux ?

Vous avez tout à fait raison en faisant ce constat. Et notre capacité de réaction est au cœur de la dyna- mique que nous avons chercher à créer et qui va porter nos actes maintenant que nous sommes élus. Cette désaffection des citoyens, voire même cette défiance, on ne les découvrent évidemment pas. Tout le projet que je porte tourne autour de ce renouveau démocratique : nos institutions et nos pratiques sont fatiguées, et les citoyens ont besoin de voir émerger de nouvelles manières de faire de la politique. Il ne s’agit pas forcément uniquement de faire émerger de nouveaux visages, il faut aussi de nouvelles pratiques politiques. Mais on touche là à d’autres incidences : ça interpelle le statut de l’élu, notamment, et aussi

“ C’est pour ça que je m’engage à faire bouger les lignes : mon ADN est bien sûr écologiste mais derrière, il y a une vraie volonté de renouveau démocratique… ”

cette réalité que, simplement pour faire campagne, il faut avoir derrière soi la machine d’un parti. Je ne découvre évidemment pas ces préoccupations mais je pense que ce qui a été remarqué par les électeurs, en ce qui nous concerne, c’est que nous étions davantage sur le terrain, davantage dans le foisonnement d’idées et davantage dans la recherche de proximité avec les gens, tels que nous étions, naturellement. Notre équipe présentait un spectre très large, très ouvert – les deux tiers des membres ne s’étaient jamais engagés auparavant en politique -, rien que cela a permis de changer la tonalité de cette campagne. Maintenant, pour ce que nous allons faire, c’est gouverner autrement comme le prouve par exemple la création d’un pôle Territoires avec des élus beaucoup plus nombreux qu’avant qui travailleront dans une plus grande proximité avec les habitants car leur rayon d’action sera plus petit qu’auparavant. Ils sont 19 élus aujourd’hui en charge de cette proximité contre les dix adjoints de quartiers du précédent mandat. Recréer ce lien de proximité et cette reconnaissance de l’ensemble des quartiers de Strasbourg est l’une de nos toutes premières priorités. C’est aussi une question d’équité territoriale : ça veut dire que là où on considère qu’il y a des conditions de vie indignes, là où on considère qu’il y a des quartiers sans services publics, sans réponses aux besoins de base des habitants, et bien là sera notre priorité budgétaire, c’est par là que nous commencerons ! Ce rééquilibrage-là, nous l’assumons complètement. Certes, ça prendra du temps mais je pense que sur la durée et avec cette proximité, on peut recréer du lien. Et tout ça en misant sur la capacité de la population à agir, en lui laissant des espaces de créativité pour le bénéfice de tous… En tout cas, même si des avancées significatives ont eu lieu dans ce domaine lors du dernier mandat, les formats comme les conseils de quartiers, par exemple, sont dépassés. Ça ne suffit pas. Il nous faut travailler en direct avec les citoyens sur des projets complexes grâce à l’organisation de conférences citoyennes où pourront intervenir des experts d’usage, des techniciens, des universitaires… Sur des questions majeures comme la pollution de l’air ou la place de la voiture en ville, on va se dire que nous allons prendre six mois pour en débattre avec les citoyens. Par ailleurs, nous allons mettre en place des ateliers de projets sur des lieux beaucoup plus proches du quotidien des citoyens qu’auparavant. Autant je pense que si ces derniers n’avaient pas forcément envie de participer à un conseil de quartier, autant je me dis que si l’opportunité de donner leur avis se présente au pied de leur immeuble, ils ne seront pas les derniers à faire des propositions… Le vrai défi est là : réintéresser les citoyens, les réembarquer dans la vie de la cité. C’est pour ça que je m’engage à faire bouger les lignes : mon ADN est bien sûr écologiste mais derrière, il y a une vraie volonté de renouveau démocratique… On ne peut le faire qu’en regardant en face la réalité : ce sont toujours les mêmes gens les plus vulnérables qui sont touchés par les questions environnementales. C’est une question de justice sociale et de dignité humaine : les questions de pollution, par exemple, ce sont toujours les mêmes qui vivent tout à côté des autoroutes et qui sont obligés de prendre leur véhicule diesel pour aller bosser très tôt le matin en horaires décalés. Ce sont les plus vulnérables qui sont le plus victimes des effets du réchauffement climatique, ce sont toujours les mêmes qui ont des problèmes d’accès à des produits alimentaires de qualité de façon à prendre soin de leur santé : toutes ces questions sociales et environnementales sont toujours liées et ces questionnements sont souvent caricaturés car il ne s’agit évidemment pas de développer des épiceries à quinoa dans toute la ville… On a été élus pour une amélioration du cadre et des conditions de vie des Strasbourgeoises et des Strasbourgeois, à commencer par celles et ceux qui en ont le plus et le plus urgemment besoin…

©Alban Hefti

Or Norme. On ne reviendra pas ici dans le détail des premières mesures prises en juillet, puisqu’il faut rappeler que vous n’avez pas vécu un seul jour de vacances d’été depuis votre élection. L’une d’elles a cependant été très remarquée, celle de la mise en place d’arbres en pots pour offrir un peu d’ombre sur les huit places les plus minéralisées de la ville. Cette mesure très symbolique là encore a été très commentée car, dans le même temps, on apprenait l’abattage de plusieurs arbres centenaires sur le site du futur Observatoire, rue de l’Université. Bien que ces terrains ne soient pas municipaux et que le maître d’ouvrage de ce projet soit l’Université de Strasbourg, vous comprenez l’étonnement et la stupéfaction des citoyens devant cet état de fait ?

Il y a beaucoup de pédagogie à mettre en œuvre sur ces sujets. Les grandes plantations d’arbres sur le territoire communal ont été réalisées il y a cent ans ou plus. On arrive aujourd’hui à une fin de cycle : il y a énormément de nos plus beaux arbres qui arrivent en fin de vie, un certain nombre sont même morts des arbres existants et en informer nos partenaires, comme l’Université dans le cas que vous citez. On voit bien à quel point on a besoin maintenant d’un plus grand nombre de zones ombragées, à mettre en œuvre dans tous nos futurs projets et bien sûr il nous faut aussi impérativement sanctuariser l’existant. C’est complexe là aussi, plus que vous ne pouvez quelquefois imaginer : à l’heure où Or Norme sortira début septembre, on aura inauguré le tram vers Koenigshoffen. A un certain moment, deux logiques environnementales se sont opposées : celle d’irriguer les quartiers avec ce transport en commun qui est un des plus écologiques qui soit. Mais, pour construire la ligne, il a fallu abattre des arbres…

Or Norme. Une question plus politique, à présent. La gouvernance de l’Eurométropole a profondément été remaniée après ces élections. Elle reposera sur trois femmes (un cas presque unique en France) : la présidente, Pia Imbs, maire de la petite commune de Holtzheim et deux présidentes déléguées, Danièle Dambach, la maire de Schiltigheim réélue dès le premier tour en mars dernier et vous-même. Beaucoup se demandent si cette gouvernance à trois têtes va pouvoir longtemps fonctionner aussi facilement qu’on peut l’espérer… 

Ecoutez, c’est très simple : on est parti du constat que ça ne fonctionnait pas auparavant. Il y avait une extrême concentration des pouvoirs qui a engendré une vraie souffrance des élus, de l’administration et des partenaires. Les projets ont également pâti
du fait qu’il y avait cette vraie guerre entre la Ville de Strasbourg et l’Eurométropole. On a donc pensé qu’il fallait sortir de cette éternelle hégémonie strasbourgeoise et qu’il fallait aller vers un travail beaucoup plus collégial avec l’ensemble des 33 communes, de la ville-centre jusqu’aux communes de première et deuxième couronnes de l’Eurométrople. Déjà, ce trio est garant de ce nouvel état d’esprit. Ensuite, il y aura un partage des responsabilités.
Nos trois bureaux sont voisins à ce même premier étage, on aura des rendez-vous communs et il y aura un cabinet mutualisé qui nous permettront d’avoir une cohérence maximum entre la ville et son Eurométropole…

Or Norme. Au passage, on apprend ainsi que vous allez conserver sur ce point la même organisation administrative qu’auparavant, à savoir un même directeur de cabinet pour la maire de Strasbourg et la présidente de la Métropole. Vous confirmez ?

Oui, absolument.

Or Norme. Une question aussi sur les premières escarmouches entre majorité et opposition au sein du Conseil municipal. Le ton a monté fortement, dernièrement, quand on vous a accusé de ne pas respecter une de vos promesses électorales, celle de confier la présidence de la Commission Budget et Finances à l’opposition, comme cela se pratique à l’Assemblée nationale ou à la Région Grand-Est, par exemple…

Il a toujours été question d’une co-présidence, durant toute la durée de la campagne. Vous voulez que je vous montre ? (Et, joignant le geste à la parole, la maire de Strasbourg se lève, saisit un exemplaire de son programme de campagne où, effectivement, nous lisons noir sur blanc ce mot de co-présidence – ndlr). Donc, ce qui a été promis sera accordé, il n’y a pas débat. Ce que je regrette, c’est que c’est l’ex-premier adjoint et qui fut aussi adjoint aux Finances lors de son premier mandat qui a instrumentalisé ce faux débat. Il a été au pouvoir durant douze ans et il n’a jamais partagé la construction d’un budget. Me faire la leçon, alors que je propose justement cette co-présidence à l’opposition pour qu’on puisse travailler ensemble sur ces questions de manière collégiale, et me dire que ce n’est pas assez, je trouve ça assez culotté pour tout vous dire… C’est dommage car l’objectif de cette Commission reste de mieux partager les décisions autour des questions financières. De fait, on s’est heurté à un problème juridique qui fait qu’on ne pouvait pas écrire le mot co-présidence dans la délibération. Mais je me suis engagée à cette co-présidence et dans les faits, ce sera le cas. La délibération reviendra au prochain Conseil municipal…

©Alban Hefti

Or Norme. Une de nos dernières questions portera sur un point dont on discute beaucoup dans les milieux commerçants et hôteliers de la ville: la problématique sécuritaire autour du prochain Marché de Noël. Suite notamment aux deux dernières éditions, un consensus s’est établi, celui de tout faire pour  « débunkeriser » ce Marché, tant l’exaspération de tous a été grande en décembre dernier. Dans ce domaine, on sait que la décision de la maire de Strasbourg ne s’impose pas forcément à la décision de l’Etat. Une de vos toutes premières rencontres officielles, avant même le Conseil municipal d’installation, a été un entretien avec la Préfète Josiane Chevalier, nouvellement nommée le 15 janvier dernier et qui n’avait donc pas pu prendre conscience personnellement des conditions sécuritaires de la dernière édition. Où en est-on à trois mois du début de l’édition 2020 ?

Lors de cette rencontre, la Préfète s’était dite ouverte aux discussions sur ces sujets et avoir bien compris qu’il n’était pas possible de rester sur un statu-quo. On a pu expliquer la manière dont ça s’était passé et cette grande exaspération qui s’était manifestée de toutes parts. Il ne s’agit bien sûr pas de faire fi des problèmes de sécurité, il s’agit de les adapter pour qu’ils soient mieux acceptés par toutes les parties concernées et notamment la population. Ce qui ne peut plus être accepté, ce sont les check-points et la fermeture des stations de tram dans l’ellipse insulaire. On a tous vu des personnes avec des difficultés de mobilité, avec des béquilles ou en chaise roulante, se retrouver complète- ment dépourvues. On travaille ensemble aujourd’hui sur ces deux points-là et il y aura des annonces officielles à la rentrée. Pour le reste, c’est à dire la réflexion sur la rénovation profonde de la formule du Marché de Noël, elle est entamée mais il faudra un an de travail pour qu’elle porte ses fruits, ce sera donc pour l’édition 2021…

Or Norme. Pour finir, une question plus intime. Durant les derniers mois et particulièrement après le résultat du premier tour en mars dernier et bien sûr durant les longues semaines qui ont suivi, vous n’avez jamais été prise de vertige devant cette accélération subite de votre destin personnel ? Car, au soir, du 12 mars dernier, la probabilité que vous deveniez maire de Strasbourg est devenue soudain une potentialité réelle…

Bien sûr, c’est une immense responsabilité pour moi et le plus grand défi auquel j’ai jamais eu à faire face dans ma vie. Alors, bien sûr effectivement, ça peut donner le vertige… Mais c’est aussi un extraordinaire monde des possibles qui s’ouvre grâce à cet aligne- ment de planètes inespéré. Il y a ce mouvement de fond, cette dynamique formidable et pas seulement à Strasbourg puisque plusieurs grandes villes de France sont concernées, il y a ce renouvellement non seulement des visages mais aussi des pratiques et des aspirations des personnes. Il y a globalement une grande cohérence dans tout ça, quand on y regarde bien. Ce qui a été dur pour moi, c’est de prendre la décision car je savais qu’en cas de succès, les événements allaient bouleverser ma vie personnelle et professionnelle durant mes prochaines années. Mais, une fois la décision prise, les choses se sont déroulées avec beaucoup de cohérence et tout est allé en s’amplifiant et sans faiblir. On n’était pas très nombreux au départ, vingt-cinq personnes à tout casser lors de notre première conférence de presse en juillet 2019 : il y avait les gens du Labo citoyen, quelques écologistes et quelques personnalités de la société civile. Mais très vite ensuite, avec beaucoup de travail collectif, les choses ont pris tournure et là, j’ai arrêté de me poser des questions… Alors, oui, je mesure bien mes responsabilités et je mesure aussi les immenses attentes que nous avons fait naître. Il faut donc absolument que nous soyons à la hauteur… »