Or Norme a 10 ans ! I Le grand entretien

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Dix ans, quarante numéros. Le raccourci simple d’une belle aventure imaginée avec une audace assumée, poursuivie en surmontant tous les obstacles les uns après les autres et qui aujourd’hui recueille un succès qu’on a le droit d’estimer mérité. On a réuni les deux artisans qui font de Or Norme ce magazine au ton unique, Patrick Adler, directeur de la publication et Jean-Luc Fournier, directeur de la rédaction, pour un dialogue qui mêle les souvenirs, les convictions et qui n’hésite pas à défricher l’avenir. Un entretien délibérément… Or Norme.

Quarante numéros (en comptant ce numéro du printemps 2021) : c’est une aventure peu commune qui fête aujourd’hui son dixième anniversaire et qui semble depuis toujours axée autour de vos deux personnalités complémentaires. Et pourtant, malgré les apparences, cette complicité qui vous unit aujourd’hui autour de Or Norme n’était nullement programmée ainsi quand le numéro un du magazine a vu le jour en décembre 2010…

Patrick Adler :  « J’ai fait la vraie connaissance de Jean-Luc il y a un peu plus de douze ans aujourd’hui quand il m’a invité aux Rencontres littéraires du Château de l’Ill qu’il organisait pour le compte de l’agence de presse ASP qu’il dirigeait. À ce moment de ma vie, j’avais un peu plus de temps à consacrer à ce type d’événements, car le groupe familial que je dirigeais jusqu’alors venait de disparaître, vaincu par les conséquences de la crise financière de l’automne 2008. Immédiatement, nous avons tous deux réalisé que nous avions pas mal d’approches communes que ce soit professionnellement ou humainement parlant : le football, qui avait amené Jean-Luc en Alsace puisqu’il avait été le directeur de la communication du FC Mulhouse quand ce club était encore professionnel, mais aussi la littérature, l’art en général… Et ce n’est que quelques mois plus tard que Jean-Luc m’a parlé de ce projet qu’il avait depuis longtemps : la création d’un magazine gratuit trimestriel, résolument centré sur l’information…

Jean-luc Fournier : Il y a quelque chose d’important qui m’a fait entamer ce bout de chemin amical avec Patrick. Il y a douze ans de cela, je l’ai entendu me raconter les douloureux ultimes épisodes qui ont mené à la disparition de la société qu’il dirigeait avec son frère Serge. Il l’a fait avec une grande sincérité et, au-delà des circonstances qu’il racontait de façon très transparente, j’ai reconnu très vite ce que j’aime chez les hommes que je rencontre : l’engagement total, la loyauté, et aussi ce qui est finalement assez rare : l’analyse sans concession de ses propres responsabilités, qu’elles conduisent aux succès ou aux échecs. En outre, très vite aussi, j’ai perçu chez Patrick cette capacité à rebondir et à repartir de l’avant et cette réelle empathie qui est la sienne, naturellement.

PA : Je me souviens en effet très bien de ces conversations fréquentes que nous avions tous les deux et sur beaucoup de sujets. En ce qui me concerne, je les goûtais d’autant plus que je prenais enfin du temps pour moi, après toutes ces années consacrées quasi exclusivement à ma société…

JLF : On raconte par ailleurs l’histoire complète des dix ans du magazine. Mais, début 2009, quand j’entame les premiers épisodes de cette belle complicité avec Patrick, je me sens presque en deuil de Or Norme, car le magazine, qui figurait dans les projets de l’agence dès sa création, en 1999, devait en fait naître au début de l’hiver 2008. L’agence de presse qui le portait avait accumulé depuis dix ans un petit « trésor de guerre » dans le but de pouvoir assumer ce lancement. La crise financière de septembre 2008 est venue casser brusquement cet élan, on est parvenu in extremis à éviter un gros crash au décollage. Néanmoins, et sans que la situation de l’économie ne se soit améliorée notablement, on a quand même décidé finalement de se lancer deux ans en plus tard, en décembre 2010. Il est tout à fait vrai que ni Patrick ni moi ne pouvions alors imaginer une seule seconde que débutait alors une aventure qui allait finir par nous associer très étroitement quelques années plus tard…

Bon, vous ne parlez tous les deux que de cette belle complicité qui s’est établie spontanément après votre rencontre. Mais n’empêche : quand on découvre ce premier numéro de Or Norme, on y lit d’entrée un grand entretien qui est consacré à… Patrick Adler ! Ce n’est sûrement pas un hasard…

JLF : Et pourtant, cela aurait pu être quelqu’un d’autre. C’est là où je dis qu’au fond, c’est vrai, le hasard n’existe pas. Le cahier des charges était simple : je souhaitais que ce magazine bénéficie d’une vraie ligne éditoriale et que d’entrée en effet, il publie chaque trimestre un grand entretien avec une personnalité réellement hors normes, pour coller au mieux avec la promesse de son titre. Le choix était vaste, j’avais déjà coché quelques noms. Mais au bout de quelques semaines, en pesant le pour et le contre de ces noms, une évidence est apparue : pour ce numéro un, il me fallait quelqu’un de totalement et fortement inattendu, quelqu’un de suffisamment connu par les lecteurs potentiels, au moins par son nom, mais dont les propos allaient réellement surprendre. Et si Patrick, via sa notoriété dans le monde des affaires, mais aussi son investissement au Racing Club de Strasbourg, cochait les cases de la notoriété, il avait aussi une personnalité insoupçonnée et très profonde à faire découvrir et qui pouvait nourrir un récit « hors normes » qui surprenne et fasse réfléchir le lecteur. C’était une parfaite opportunité pour un numéro inaugural. Je ne savais pas que j’allais avoir un mal de chien à le convaincre…

PA : Je me souviens très bien de ce moment-là : j’avoue avoir été très surpris de la demande de Jean-Luc et j’ai d’abord en effet refusé plusieurs fois, je ne voyais pas en quoi mon parcours pouvait présenter le moindre intérêt pour un grand entretien. J’étais en train de me reconstruire après l’arrêt du groupe industriel Adler, et j’étais aussi en train d’écrire le projet qui allait devenir plus tard Aedaen et Jean-Luc a dû beaucoup ramer pour me convaincre. Et je n’ai finalement jamais regretté d’avoir accepté cette interview parce que je crois à l’importance de l’écrit : que Jean-Luc ait su poser les choses et m’ait donné l’occasion d’exposer mon projet lui a quelque part permis d’exister. Je m’en suis vraiment rendu compte en relisant l’entretien bien après sa parution : quand une pensée est là et s’exprime, le projet existe, il vit déjà. S’il n’y avait pas eu cet article, peut-être le projet Aedaen n’aurait-il jamais vu le jour. Ce qui fut le cas six ans après…

Avant d’en arriver à cette période où vous allez vous retrouver tous deux très liés à la barre de Or Norme, il y a un numéro tout à fait spécial qui vous a, je l’imagine, encore plus soudés. En avril 2012, le n° 5 de Or Norme publie, sur une quarantaine de pages, un dossier « Destinations de légende » consacré à Israël. Et on y retrouve déjà vos deux signatures…

JLF : Depuis l’origine, nous avions en effet eu l’idée d’aller à la rencontre des Alsaciens de l’étranger et nous leur demandions de nous faire visiter le pays où ils vivent et où ils travaillent. Outre le fait d’être évidemment passionnant à réaliser, ce numéro « Destination de légende » qui paraissait chaque année au printemps était à chaque fois merveilleusement accueilli par les lecteurs. C’est Patrick qui m’a suggéré Israël qui est un pays qu’il connaît particulièrement bien et où de nombreux Alsaciens se sont installés. Ni une ni deux, j’ai dit OK, mais à une condition : on y va ensemble…

PA : Ce fut un voyage important. Nous avons passé dix jours mémorables, ce qui nous a permis d’encore mieux nous connaître. Et puis surtout, j’ai découvert ce qu’était le travail et la vie d’un journaliste sur le terrain, de la préparation du voyage très en amont jusqu’à l’improvisation quasiment permanente sur place puisque les choses se passent somme toute rarement comme elles sont prévues. Ce furent dix jours extraordinaires où on n’a cessé de vivre des rencontres et des expériences magnifiques et c’est vrai que c’est exceptionnel de faire découvrir ainsi un pays et ses habitants, qu’on croit connaître. Le magazine a eu un retentissement important quand il est sorti quelques semaines plus tard et cet épisode vécu ensemble a encore renforcé notre amitié…

JLF : Un magazine où on peut lire un très beau papier écrit par Patrick sur André Chouraqui et qui retrace bien l’esprit qui nous avait conduits ici, sa veuve, Annette, nous ayant souvent accompagnés elle aussi sur le terrain. André, formidable intellectuel et humaniste, avait traduit la Bible, les Évangiles et le Coran et oeuvré au dialogue entre les frères humains qui vivent en Israël. Ce magnifique papier, Patrick l’a écrit dans l’avion du retour, en une heure, pendant que je piquais un petit roupillon…

Les quatre années qui suivirent furent très mouvementées au point, Jean-Luc, que vous avez envisagé de cesser la parution de Or Norme…

JLF : Oui… La crise économique qui perdurait a fini par rattraper l’agence de presse qui éditait le magazine au début de l’été 2013. Elle a dû brutalement cesser ses activités. Heureusement, le titre m’appartenait en nom propre ce qui lui a permis de ne pas cesser net sa parution. J’étais alors à quelques trimestres de ma retraite, il y avait donc cette nécessité de tout faire pour que le magazine perdure. Heureusement, l’équipe rédactionnelle de base, Véronique Leblanc et Charles Nouar ainsi que Julie, notre graphiste, ont fait front et n’ont rien lâché et les annonceurs nous sont pour la plupart restés fidèles. Mais au bout d’un peu plus de deux ans plus tard, au moment de faire valoir mes droits à la retraite, j’étais un peu rincé par tous ces événements et effectivement, j’ai songé à l’arrêt de la parution. Après tout, on avait alors sorti une bonne vingtaine de numéros — on aurait bien signé pour le quart en 2010 — et on n’avait pas à rougir de la performance…

PA : Je me souviens du jour où Jean-Luc m’a annoncé son intention d’arrêter ; je venais de lui faire visiter le lieu qui allait devenir la brasserie, la pizzeria et la galerie Aedaen. Je lui ai tout de suite dit : « Tu ne peux pas faire ça, pas après t’être battu aussi longtemps ». Mais je comprenais bien sa lassitude. De la rédaction au commercial en passant par la comptabilité, il était au four et au moulin depuis plus de cinq ans… Sur le coup, je n’avais pas la moindre idée de la façon dont j’allais m’y prendre pour l’aider, mais je lui ai suggéré de me mettre à la recherche d’un repreneur…

JLF : Et 48 heures plus tard, Patrick m’annonçait que ce repreneur, c’était… lui ! Ce qui fut pour moi une totale surprise, car je n’avais vraiment rien vu venir. Et ce qui m’a immédiatement soulagé, car, sincèrement, je ne voulais pas que le magazine tombe entre n’importe quelles mains, on avait bien trop ramé pour le voir devenir un énième gratuit insipide, sans fond et sans personnalité…

Jean-Luc Fournier © Nicolas Roses

Patrick, qu’est-ce qui vous a décidé à relever ce défi et vous engager dans cette aventure ?

PA : D’abord, il y avait une condition : que Jean-Luc continue à diriger la rédaction, pour moi c’était évidemment unpoint capital. Ensuite, je me suis dit que si j’avais sûrement la possibilité d’aider à développer commercialement le titre, il fallait aussi le développer sur le numérique où on ne pouvait jusqu’alors que simplement le feuilleter. Ce qui fut fait quelques mois plus tard, avec une nouvelle maquette et un plus grand nombre de pages. Très vite, j’ai également imaginé de surfer sur quelques événements exclusifs d’où l’idée du Club des partenaires qui comptent aujourd’hui près d’une quarantaine d’annonceurs qui nous soutiennent à chaque parution et qui sont tous d’une fidélité exceptionnelle. Or Norme a donc fortement augmenté sa diffusion donc sa visibilité et s’est positionné comme une marque globale print/digital/événementiel très présente au coeur de la vie de la cité. La signature qu’on a choisie ensemble avec Jean-Luc, c’est « un autre regard sur Strasbourg ». On revendique l’amour qu’on porte à notre ville, mais on revendique également le fait de la regarder sous des angles parfois inattendus…

En tout cas, il y a un parti pris éditorial qui existait déjà à l’origine et qui perdure : Or Norme est un magazine généraliste d’information, réalisé par des journalistes…

JLF : J’exprime un peu plus loin dans ce numéro-anniversaire cet aspect des choses, car il est essentiel : je n’ai jamais compris pourquoi, dans ce pays, la presse gratuite est si souvent affublée de cette image négative d’un média où quelques vagues articles rédactionnels remplissent les espaces entre de nombreux espaces publicitaires. Pour moi, il y a dix ans, il n’était nullement question de s’inscrire dans cette voie-là. Et ce dont je suis assez fier aujourd’hui, c’est qu’Or Norme a vu le jour, s’est développé et a su se pérenniser sur la base d’un vrai travail journalistique. On en apporte la preuve numéro après numéro avec des dossiers qui demandent certes un travail considérable, mais qui sont lus et commentés bien au-delà de notre lectorat de base. Dans notre dernier numéro, notre enquête et nos interviews portant sur la présence du siège du Parlement européen à Strasbourg qui est remis en cause et qui ne tient qu’à un fil a suscité beaucoup de réactions, jusqu’au ministère des Affaires étrangères. Notre interlocuteur principal qui parle dans ce dossier a démontré à quel point ce sujet révèle les carences, des plus locales aux nationales : les trois derniers présidents de la République, les maires de Strasbourg qui se sont succédés, la haute administration d’État… Nous respectons la promesse de notre titre : « un autre regard sur Strasbourg »…

PA : En 2016, quand on a décidé de travailler ensemble, Jean-Luc et moi, on a voulu faire de Or Norme un vrai magazine. Pour cela, il fallait renforcer la rédaction, ce qui fut fait grâce à l’arrivée de nombreux nouveaux annonceurs. Ce qui fait notre réussite, en tout cas ce qui fait que nous sommes toujours là, car je ne sais pas si on peut parler de réussite, ce qui fait que nous sommes aujourd’hui lus et attendus, c’est aussi le fait d’être guidé par autre chose que le seul profit financier. Il y a surtout cette vraie motivation, il y a une vraie envie, un vrai esprit d’équipe dans ce magazine aussi bien parmi les journalistes et rédacteurs que chez les photographes ainsi que tous celles et ceux qui font tourner la machine. Et cet état d’esprit, on le retrouve aussi chez nos partenaires et annonceurs qui ont été d’une fidélité exceptionnelle en 2020 qu’ils ont renouvelée pour l’année en cours. Cet état d’esprit règne également chez nos lecteurs qui nous apportent également beaucoup de témoignages : nous sommes toujours sidérés de constater le nombre de gens qui nous communiquent leurs réactions, notamment via les réseaux sociaux… Enfin, il y a un point important que je me dois de souligner : notre équipe de journalistes cultive avec soin son esprit indépendant. Ils le sont tous, statutairement, mais ils le sont aussi dans leur façon de travailler. Nous tous, nous vivons cette ville à fond et si Or Norme fait partie des acteurs qui se distinguent à Strasbourg, nous conservons un certain esprit critique, car nous ne sommes pas pour autant affiliés à qui ou quoi que ce soit. Nous sommes, je crois, respectés pour cette indépendance d’esprit…

À l’issue de ce bilan de dix ans de Or Norme, il est difficile de ne pas évoquer vos projets pour la prochaine décennie. Parce que vous en avez, n’est-ce pas…

JLF : Ouh la, dans dix ans !.. Bon, c’est vrai que ça passe vite, une décennie, la preuve… Personnellement, je ne me suis jamais projeté aussi loin à l’époque du numéro 1. Mais bon, je vis une retraite formidable grâce à ce beau développement de Or Norme que Patrick a su initier. Je retrouve le plaisir inouï de faire mon métier à fond et d’animer cette formidable équipe de rédaction. Oui, nous avons des projets : nous travaillons beaucoup aujourd’hui sur les plateaux diffusés en direct sur Facebook live dont nous avons propotypé le modèle il y aura bientôt un an pour le compte de l’Eurométropole pour accompagner le premier déconfinement. On a également cartonné avec l’émission de début décembre dernier consacrée à la géothermie profonde, pour laquelle la nouvelle municipalité nous avait sollicités. Plus récemment, on a monté une autre émission en direct pour l’hommage au regretté Bernard Stalter pour le compte de la Chambre des Métiers d’Alsace. Et nous travaillons sur un très gros programme d’émissions en direct et de reportages pour un important organisateur d’événements en Alsace. Nous sommes persuadés avec Patrick qu’un développement majeur pour Or Norme sera au rendez-vous sur ce type de média et nous sommes heureux qu’on nous sollicite à ce sujet et qu’on fasse appel à nos compétences journalistiques…

PA : Jean-Luc a raison d’insister sur notre ADN journalistique. Elle est à la base de nos productions, les quatre numéros trimestriels de Or Norme, notre programme de hors-séries annuels — il y en aura cinq en 2021 — et nos partenariats avec les Bibliothèques idéales, St-Art la Foire internationale d’art contemporain, les Internationaux de Tennis de Strasbourg ou encore le salon Egast sur la gastronomie et les métiers de la restauration et donc, les émissions en direct live sur Facebook que nous produisons aujourd’hui. À l’occasion du premier confinement, on a vu toute l’importance prise par le média vidéo, on s’est très vite positionné sur ce média vis-à-vis duquel on a acquis un vrai savoir-faire en privilégiant les contenus journalistiques et les diffusions en direct de qualité qui sont devenus notre marque de fabrique, car ces émissions ne tolèrent évidemment pas le moindre amateurisme en matière de diffusion. Il y a eu un tournant quand nous avons enregistré puis diffusé les interviews des candidats en lice pour ce premier tour des élections municipales. Nous y avons apporté la « touche » Or Norme en rencontrant les candidats dans un cadre feutré, intimiste et nous avons particulièrement soigné l’ambiance. Du coup, je crois que les candidats — en tous cas, c’est ce qu’ils nous ont dit — se sont livrés bien mieux et bien plus que partout ailleurs. Et puis, nous avons organisé et animé en direct le débat du second tour. Les statistiques de vues sur internet ont été impressionnantes et les retours ont été excellents et de toutes parts, chacun soulignant notre professionnalisme et notre intégrité en la matière. Avec Jean-Luc, nous croyons qu’il y a là une vraie opportunité pour développer ce nouveau média et du coup, renforcer le potentiel de la marque Or Norme… En tout cas, tous nos projets, et nous ne pouvons pas tous les évoquer ici, sont sous-tendus par cette exigence incontournable : produire du travail de qualité et avoir des contenus à la hauteur du contenant, car nous respectons nos lecteurs et nos annonceurs…

Patrick Adler © Nicolas Roses

JLF : Pour écrire les pages qui suivent et qui reviennent sur les dix ans du magazine, nous nous sommes livrés à un important travail statistique dont le résultat nous a nous-mêmes surpris. Depuis le n° 1 de décembre 2010, nous avons interviewé exactement 798 personnes, et je ne parle ici que des gens rencontrés spécifiquement, en tête à tête. Si l’on y ajoute les gens simplement cités, c’est-à-dire ceux avec lesquels nous avons eu un simple échange de mail ou un coup de fil, nous ne sommes pas loin de 1 200 personnes dont nous avons recueilli les propos depuis 39 numéros. Ça, c’est un vrai marqueur de notre intégration dans la vie de la cité. Dans un des tout premiers éditos, j’écrivais que le rôle d’un magazine trimestriel est aussi de donner la parole à toutes celles et ceux qui font, avant de paraître et de briller médiatiquement. Ces faiseurs, nous les dénichons, les rencontrons, les questionnons et le magazine leur fait la part belle depuis dix ans. Et bien sûr, nous allons continuer. Il y a du travail, Strasbourg est une ville très prolixe en la matière. Les porteurs de projets sont innombrables et démontrent un formidable sens de l’innovation. À chaque fois, nous sommes heureux et fiers de les mettre dans la lumière. Quelquefois, dans un même numéro, à peine à quelques pages d’écart, il y a une personnalité d’audience nationale qui s’exprime et, dans la foulée, des anonymes locaux qui disent eux aussi les passions qui les animent. Dans notre dernier numéro, en décembre dernier, c’est un des plus célèbres philosophes français, André Compte-Sponville, qui commentait notamment « la pente dangereuse sur laquelle nous avons commencé à glisser » depuis un an que la pandémie s’est invitée au coeur de notre quotidien. Dix pages plus loin, quatre professeurs de collège, réunis par nos soins au sein d’une table-ronde, disaient leur émotion et leur désarroi après l’assassinat de leur collègue Samuel Paty et, dans les pages suivantes, on découvrait, notamment, Astrid Franchet, une éditrice schilikoise qui publie des livres somptueux… Sincèrement, à la lecture de ce numéro, à la veille de nos dix ans, nous nous sommes dit une fois de plus que Strasbourg était la ville française idéale pour abriter un magazine comme le nôtre et que nous ne nous étions pas trompés vers la fin des années 2000 quand nous avions élaboré et écrit notre ligne éditoriale. Nous avons tous pris dix ans de plus, mais elle, elle n’a pas vieilli… »

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