Noémie Kohler tient bon pour Cécile
Tout faire pour que Cécile Kohler soit libérée par le régime des mollahs. Savoir que les séquelles de l’enfermement sont inévitables. Avancer au jour le jour. Rester forte pour elle. Sa soeur Noémie ne baisse pas les bras.
« Cécile a le droit d’appeler quelqu’un de sa famille à peu près une fois par mois, on ne sait pas quand et on ne sait pas qui, tout dépend du bon vouloir des autorités iraniennes », confie Noémie Kohler. Cela fera trois ans en mai qu’elle attend ces appels de venus de la prison d’Évin à Téhéran où sa soeur Cécile est enfermée dans la section 209, quartier de haute sécurité sous contrôle des renseignements iraniens. Le plus dur de tous. Près de 36 mois, sans quitter son téléphone désormais accroché au cou. Quand nous lui avons parlé, le 20 février dernier, Cécile avait appelé la veille et le chercheur Jacques Paris, son compagnon arrêté en même temps qu’elle sous de fallacieux prétextes d’espionnage, était à ses côtés. « C’était très dur, dit Noémie. L’état de santé de Jacques est extrêmement préoccupant et, pour la première fois, Cécile s’est autorisée à parler de son désespoir. »
L’arbitraire des geôliers
Un désespoir entretenu par leurs geôliers qui soufflent le chaud et le froid, leur promettent une libération proche et font ensuite brutalement marche arrière. « Cela fait un an qu’ils sont autorisés à se voir pour appeler, précise Noémie, ce qui les aide beaucoup, mais là encore il s’agit d’un moyen de pression. Ils peuvent en être privés par pure arbitraire. » À chaque coup de fil, les familles se préviennent. Noémie, la Lyonnaise, joint ses parents et ses frères Luc et Robin installés à Soultz. On appelle la famille de Jacques, les amis, les soutiens. Il faut rester soudés.
Cette solidarité sans faille est d’autant plus importante que rien ne laisse présager une issue rapide. « On y a cru en apprenant que nous allions être reçus à l’Élysée le 17 février, dit Noémie, mais à l’issue de notre entretien avec le président Macron, nous avons compris que ça pouvait encore durer des mois et nous n’y étions pas préparés. » Elle parle du « besoin d’espérer mêlé à la peur d’espérer » comme en écho aux angoisses traversées par sa soeur, par Jacques et par Olivier Grondeau, otage lui aussi depuis 2022. (NDLR – Depuis la publication de cet article, Olivier Grondeau a été libéré le jeudi 20 mars.)
Homère pour compagnon de cellule
Du quotidien de Cécile, Noémie raconte la cellule de 9 m2, sans fenêtre, mais éclairée 24 heures sur 24, l’absence de lit, les sorties d’une demi-heure trois fois par semaine dans la cour. « On sait que le cauchemar ne s’arrêtera pas à leur libération, les dégâts physiques et psychologiques seront terribles, il faudra du temps et nous nous préparons déjà à être là pour eux. » Reste que « pour l’instant, insiste Noémie, l’urgence absolue est leur libération à tous, Cécile, Jacques et Olivier Grondeau pour qui nous avons également très peur. »
Elle parle aussi des livres envoyés à soeur, mais jamais reçus. « Cécile dispose de trois livres qui circulaient dans la prison, le tome 2 de Millenium, La Nuit du sérail et L’Odyssée d’Homère qu’elle est en train d’apprendre par coeur. »
Noémie Kohler (à gauche) avec Cécile. ©DR