Trianon Résidences « La volonté de définir le champ des possibles »

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À la tête de Trianon Résidences depuis sept ans, Cédric Simonin est convaincu que les promoteurs immobiliers peuvent être de vrais partenaires des élus pour co-construire la ville de demain, loin des simples postures commerciales. Il applique cette conviction sur le terrain, avec un grand sens du pragmatisme.

Or Norme. Un mot tout d’abord sur Trianon Résidences, un jeune promoteur immobilier puisque la société a seize ans aujourd’hui…

Et le groupe dont nous faisons partie, Vivialis, n’est guère plus âgé puisqu’il a été créé en 1999 par trois amis qui se sont alors lancés avec une idée assez précise de l’acte de construire et une volonté assez farouche : ne pas faire comme les autres. Le secret est bien sûr d’essayer d’accompagner les évolutions sociologiques et technologiques et elles n’ont pas manqué, en vingt ans. Le groupe réunit un pôle maison individuelle, un concept innovant qui est le Carré de l’Habitat et enfin Trianon Résidences qui est né en 2004. En reprenant Trianon Résidences à l’été 2013, je me suis basé sur les comportements des clients qui, venant du collectif, acquéraient une maison individuelle. Des arguments revenaient très souvent, s’ils ne voulaient plus habiter dans un logement collectif, cela tenait à des problématiques liées à la relation à l’autre : irrespect, incivilités, notamment. Du coup, il fallait réfléchir à proposer une offre assez différente. Elle s’est basée sur cinq piliers avec un socle principal basé sur la notion de développement durable : la notion de bien-être, particulièrement liée à la qualité de l’air intérieur, que nous avons traité en étroite collaboration avec un professeur allergologue de l’Université de Strasbourg afin de pouvoir travailler avec des industriels pour qu’ils nous fournissent des solutions pérennes.

Or Norme. Vous parliez des autres piliers qui sont en quelque sorte l’image de marque de Trianon Résidences. Quels sont-ils ?

Toujours en partant de mon expérience en maisons individuelles, j’ai voulu répondre à une critique souvent entendue : un logement neuf n’a pas d’âme. Alors, nous avons décidé de confier ces halls d’entrée à des artistes, charge à eux de faire perdurer l’histoire du territoire sur lequel la construction a été érigée. Le troisième pilier a été de vraiment accompagner les communes sur lesquelles s’élèvent nos résidences sur les problématiques de mobilité : transports en commun, pistes cyclables, etc., en incitant les usagers de nos immeubles à adhérer à des systèmes assez simples, la mise à disposition de vélos électriques ou celle de véhicules électriques en auto-partage, par exemple. Le quatrième pilier sur lequel s’appuie la société est l’innovation : penser les façades dépolluantes, ou encore imaginer la vision de leur futur appartement mais aussi de son quartier en immersion 3D totale grâce à des lunettes adaptées. Cela fait six ans que nous développons cela. Enfin, le cinquième pilier, ce sont nos propres garanties que nous apportons aux clients. Elles concernent surtout les « accidents de la vie, les cas de divorces, décès, ou perte d’emploi, entre autres…

Or Norme. Peut-on imaginer qu’un promoteur immobilier puisse s’investir en profondeur dans la définition-même de la politique de la ville auprès des élus, dont c’est bien sûr la mission première ?

La question est bien sûr très vaste. Il y a deux notions. La première, et de loin la plus importante, est la temporalité. Une politique publique de la ville s’inscrit sur au moins vingt-cinq ans. Ce qui veut dire, pour nous autres promoteurs, qu’il ne faut pas rentrer dans la logique des clivages politiques. Il faut prendre de la hauteur. Ce problème de temporalité très longue est un vrai souci pour les élus, ils ne sont en place que pour six ans. Mais, et ce n’est pas à la même échelle bien sûr, nous avons nous aussi ce problème de temporalité. Une nouvelle construction en collectif, c’est dix-huit mois pour qu’elle sorte de terre, mais auparavant, il y a au moins six mois de discussion et de négociation avec les élus et un nouveau délai de six mois pour la préparation complète des formalités administratives en vue d’obtenir le permis de construire. Donc il y a entre trente et trente-six mois entre le moment où l’on entre en contact et la livraison finale du bâti. Et ne perdez pas de vue que ces chiffres ne concernent qu’un bâtiment. Imaginez ce que cela veut dire pour tout un nouveau quartier résidentiel… La seconde notion, c’est qu’il faut que les élus aient une vision précise de leur politique de la ville. Entendons-nous bien : il ne s’agit de blâmer personne, ils ne sont pas toujours des spécialistes de l’urbanisme. Donc, généralement, ils consultent et c’est là qu’il faut comprendre qu’il ne suffit pas de travailler entre élus et promoteurs. En plus, autour de la table, il faut aussi des bailleurs sociaux, des sociologues, des médecins, des urbanistes et j’en passe… Ils peuvent venir d’horizons très différents, c’est d’ailleurs sans doute souhaitable, mais ils doivent tous ne jamais perdre de vue qu’ils sont au service de la vision de la politique de la ville conçue par les élus et clairement exprimée dès le départ. Ce premier cercle doit être rejoint par d’autres : les industriels du secteur des matériaux du bâtiment, les spécialistes des mobilités urbaines, ceux des innombrables innovations qui nous permettent de mieux communiquer. Les incidences sont vertigineuses, quelquefois : par exemple, certains pensent encore que les véhicules autonomes relèvent de la science-fiction mais ce n’est qu’une question de quelques années avant que cela ne se généralise pour le grand public. Quand je parle d’une politique de la ville qui doit s’élaborer sur au moins vingt-cinq ans, c’est jusque-là qu’il faut avoir la volonté de définir le champ des possibles, sans dogme, de façon pragmatique. Je suis convaincu qu’il faut travailler sans jamais perdre de vue cette temporalité longue, c’est essentiel. Faire adhérer l’ensemble de la population à ce projet-là est l’indispensable deuxième notion. C’est la garantie ultime pour que toutes les décisions publiques, quels qu’en soient les signataires, s’inscrivent dans cet incontournable temps long. C’est l’objectif à atteindre et je sais bien que c’est loin d’être facile. Mais c’est indispensable.

Cédric Simonin © Nicolas Roses

 

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