José de Guimarães aux racines du monde

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«Mes œuvres ont toujours un sens. Je regarde le monde pour y trouver ce qui peut aider à réfléchir sur la vie et le monde actuel.» Rien de plus juste que ces mots prononcés par José de Guimarães, en juin dernier, lors du vernissage de l’exposition que lui consacre le musée Würth jusqu’en mars prochain.

 

Qu’est-ce que l’art s’il ne nous fait pas nous sentir plus vivant ? Qu’est-ce que l’artiste s’il ne va pas là où personne d’autre que lui va ?
Eternel voyageur, José de Guimarães s’en est allé au plus lointain du monde pour y nourrir les racines de son être et de son art.
Il est né au Nord du Portugal, dans la petite ville médiévale de Guimarães dont il adoptera le nom pour signer ses œuvres. Un peu comme si ce «nomade transculturel», selon le mot du critique d’art, Pierre Restany n’avait jamais voulu perdre de vue son appartenance à une terre première.
Passionné de gravure dès l’époque de ses études d’ingénieur à Lisbonne, il s’oriente très vite vers l’art et touche au Pop Art comme le rappellent les premières œuvres exposées.

Des images à écouter

La découverte de l’Angola en 1967 sera pour lui un déclic.
«Pour la première fois, raconte-t-il dans le catalogue, j’ai été confronté à une culture non occidentale, sans écrit, de tradition orale. » Un monde au fort contenu magico-religieux où la communication idéographique fonctionne comme une véritable écriture. Cela lui inspirera son propre Alphabet africain (1971-1972), ensemble de 32 pièces achetées par Reinhold Würth il y a longtemps et pour la première fois exposée à Erstein dans sa totalité. Des images à «écouter» qui constitueront la base du travail de l’artiste dès les années 1970.
Africaine au départ, son inspiration nomade s’enrichira de la rencontre avec d’autres cultures : mexicaine, chinoise, japonaise… créant au final un «vocabulaire Guimarães» fait de codes et de symboles que chacun interprète comme il le veut. «Je ne veux rien imposer», dit l’artiste.
Puissamment colorées, fondées sur la découpe, la fragmentation, la dislocation, les œuvres de Guimarães font dialoguer entre elles les cultures anciennes et la modernité. Elles syncrétisent les continents et les cultures avec une énergie vitale farouche. Pleines d’humour, totémiques, incandescentes.

Collectionneur passionné

Artiste ethnologue, José de Guimarães est aussi collectionneur d’arts premiers comme le rappelle un ensemble d’œuvres africaines présentée au rez-de-chaussée du musée. «Sur des estrades en gradins et dans une vraie proximité avec le public» a-t-il noté avec soulagement lors du vernissage car il craignait des vitrines par trop muséifiantes. Masques sculptés et figures de reliquaires entrent en résonnance avec les œuvres et marquent la fin d’un cycle avant que l’on accède à l’étage où sont exposées les pièces marquées par la découverte de l’Amérique du Sud et de l’Asie.

Une Madona très pop

La dernière série exposée nous ramène en Europe. Elle est inspirée de La Vierge et l’enfant avec le bourgmestre Meyer, une œuvre de Hans Holbein le Jeune appartenant à la collection Würth comme une grande majorité des pièces exposées. Chaque personnage y est réinterprété par l’artiste dans des aplats graphiques et colorés. L’enfant Jésus prend tantôt l’allure d’une poupée, tantôt celle d’une statuette africaine.
Omniprésent, le chiffre 3 intrigue. L’artiste y voit un «symbole de bonne fortune» et le trace volontiers.
Ni une, ni deux donc… ne ratez pas cette rétrospective d’un artiste consacré par une reconnaissance internationale mais trop rarement exposé en France

Jusqu’au 15 mars 2020
Du mardi au samedi de 10 h à 17 h,
le dimanche de 10 h à 18 h, fermé le lundi.
Entrée gratuite
www.musee-wurth.fr