Marc Keller « L’émotion, je la ressens à tout moment, et pas forcément qu’au stade. Je la ressens quand les gens me disent à quel point le Racing les rend heureux… »

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Le Président du Racing revient longuement sur les dix ans qui se sont écoulés depuis la reprise du club en 2012. Un long voyage qui raconte comment l’unité s’est faite autour du projet, comment le Racing a grandi, comment il pourrait grandir encore. Et toutes les émotions que l’aventure a charriées.

Nous nous rencontrons ce 1er juin, quelques jours après la conclusion d’une formidable saison du Racing Club de Strasbourg Alsace. Au moment d’aborder avec vous la thématique de cette décennie Or Norme, comme nous le titrons sur la couverture de ce magazine, je voudrais que vous réunissiez vos souvenirs d’il y a dix ans pour nous dire dans quel état d’esprit vous vous trouviez au moment où vous avez été contacté pour reprendre ce club qui a toujours été très cher à votre coeur. C’était en 2012…

Ce dont je me souviens c’est que le club avait déposé le bilan en 2011, l’année même où j’avais moi-même quitté Monaco. Avec ma famille, nous étions donc revenus vivre à Strasbourg. En ce qui me concerne, je travaillais pour Canal+ le week-end. En tant que consultant, je couvrais les matchs des championnats allemands et anglais.
Comme beaucoup de gens, je savais que l’équipe de dirigeants avait quelques soucis pour assurer la saison 2011-2012 en cours.
Je n’étais alors absolument pas dans une quelconque réflexion de reprise, je ne m’étais pas projeté dans quoi que ce soit concernant le Racing. Il y a eu un rendez- vous décisif quand Patrick Adler m’a informé qu’Alain Fontanel (alors adjoint des finances au sein de la Municipalité menée par Roland Ries – ndlr) souhaitait nous rencontrer. J’ai appris plus tard qu’Alain Fontanel avait contacté Patrick en sa qualité d’ancien président du conseil de surveillance et qu’il avait fait de même avec quelques personnalités car il était très inquiet sur l’avenir à court terme du Racing.
Alain a été direct en me disant qu’il fallait absolument trouver une solution rapidement car le club était menacé de ne pas passer l’obstacle de la DNCG et allait tout droit vers un deuxième dépôt de bilan successif.

Ce soir-là, après ce rendez-vous, c’était « tempête sous un crâne » quand vous êtes rentré chez vous ?

J’avais retenu que la situation du Racing était quelque part dramatique. Immédiatement après le rendez-vous, j’avais dit à Patrick que si on ne reprenait pas le club, il allait se retrouver en très, très grand péril. C’est ça que j’avais en tête en rentrant à la maison : soit on reprenait le Racing assez rapidement, soit il serait impossible de sécuriser la montée en CFA. Ma première intuition a été de comprendre qu’il fallait que toutes les collectivités locales soient parties prenantes dans ce projet. En même temps, j’ai dit à Patrick : « si je dois y aller, je veux avoir la main, être celui qui va porter le projet. »

©Nicolas Rosès

Comment vous y êtes-vous pris ?

Lors de la première aventure et la reprise du club à IMG en 2003, Patrick et moi étions entourés de trois personnes, Egon Gindorf, Pierre Schmidt et Thierry Wendling. Egon est le premier que j’ai appelé, à Monaco où il vivait. Je lui ai parlé de la situation du club mais aussi du rendez-vous que nous avions eu avec Alain Fontanel. Egon m’a demandé très vite ma position. Et il a ajouté : « Si tu y vas, j’y vais. Je serai avec toi comme je l’ai toujours été ». Le tout n’a pas pris trois minutes. Ce fut tout aussi rapide avec Pierrot Schmidt et Thierry Wendling. On a ensuite pu s’attaquer à compléter le tour de table. Du côté des collectivités, on avait l’appui à 100 % de Roland Ries et de son premier adjoint alors, Robert Herrmann. Je suis très vite allé rencontrer Philippe Richert qui présidait la Région Alsace. Ce fut un autre rendez-vous décisif. Philippe Richert a tout de suite compris l’importance du Racing aux yeux de tous les Alsaciens et qu’il fallait donc tout faire pour nous soutenir. Il a développé une vraie vision sur le sujet. Tout comme Roland Ries, Robert Herrmann et Alain Fontanel, ils ont été fidèles du début à la fin.

Tous ceux, élus ou privés, que nous avons rencontrés pour évoquer les souvenirs d’il y a dix ans ont affirmé que vous aviez pris alors un seul engagement au niveau sportif : faire en sorte que le Racing émarge de nouveau dans les rangs du football professionnel…

Quand nous avons travaillé à la reprise du club, je me suis dit, avec mes proches, qu’on était là pour quelque temps et nous avions bien conscience que le foot, aujourd’hui, demande des moyens considérables. Effectivement, il fallait ramener le Racing au niveau professionnel. De façon un peu intuitive, on s’était donné cinq ans pour y parvenir. C’est pourquoi, en même temps que nous nous assurions de pouvoir compter sur les collectivités, il fallait mettre sur pied cette réunion d’actionnaires indispensables au succès futur du club. On a réuni moins d’une quinzaine d’amis, en fait, et ce fut somme toute assez simple, car tout était basé sur la grande amitié et l’amour du Racing qui nous réunissait. Cette amitié n’a jamais failli depuis. Elle nous a portés jusqu’à aujourd’hui.

On a le réel sentiment que ce pacte d’actionnaires et la belle mentalité des personnes concernées constituent l’un des éléments majeurs de la réussite. Beaucoup se souviennent évidemment qu’au cours des décennies précédentes, tout n’a pas été rose dans la gouvernance du Racing. Au point, d’ailleurs, que le club avait déjà frôlé le précipice à plusieurs reprises…

Il fallait une hiérarchie dans l’actionnariat, ça c’est complètement légitime, mais la grande force, depuis dix ans, c’est qu’avec Egon, Pierrot, Patrick et Thierry, nous avions tiré beaucoup de leçons de notre première expérience. Elle nous a soudés, à l’époque, et une amitié indélébile en est née. Tous ces ingrédients ont été essentiels dans ce que nous avons dû mettre en place, d’autant qu’il a fallu aller très vite. En dehors de ce noyau, on a pris quelques actionnaires avec comme objectif de fédérer un maximum sur le territoire et de faire bénéficier le club de tous nos réseaux. À la base, nous avons tous été spontanément d’accord sur le constat de départ : le Racing avait déposé le bilan et vivait une période de grande instabilité. Il y avait de gros problèmes d’infrastructures. Le centre de formation était mort puisque nous étions devenus un club amateur. Une fois ce constat posé, on a imaginé trois piliers sur lesquels je me suis toujours appuyé depuis, et qui sont la base sur laquelle nous avons construit. Le pilier le plus essentiel était de graver dans le marbre le fait que le club ne pouvait plus se permettre d’être chaque année en déséquilibre financier. Notre objectif premier était donc assez simple, en fait : se débrouiller pour faire rentrer le plus d’argent possible et dépenser en fonction de nos recettes effectives. Et cet objectif a été toujours été respecté depuis, hormis l’an passé, mais c’était l’année Covid et Mediapro (cette société espagnole, filiale d’un fonds d’investissement chinois, n’a pu acquitter que la première échéance des droits qu’elle avait remportés en 2018. Sa faillite a plongé le football français dans une très grave crise financière – ndlr). Le deuxième pilier a été de faire en sorte que le Racing bénéficie d’une gouvernance stable et apaisée. Huit ou neuf présidents venaient de se succéder depuis notre départ, ça ne pouvait plus durer ainsi. Enfin, le troisième pilier, le plus important peut-être et qui a été décliné depuis dans tous les secteurs du club, a été notre volonté de bâtir et faire progresser un club territorial. J’ai toujours pensé qu’il existe, aujourd’hui, des marques mondiales comme Manchester, le Real ou quelques autres, très suivies par les jeunes et les moins jeunes, mais qu’à côté, il y a de la place pour les clubs territoriaux. Pour moi, il y a dix ans, cette idée de Strasbourg, son Eurométropole et l’Alsace était une évidence absolue. Je voulais que tout l’écosystème alsacien s’aligne derrière le club.

Dans un autre entretien, que nous avons réalisé avec Jean-Luc Delanoue, le directeur commercial d’alors, nous avons été frappés par le fait que vous avez, dès le départ, choisi des hommes tout à fait aptes à épouser très vite les valeurs du club…

Jean-Luc avait déjà travaillé avec nous lors de la première expérience et il possédait en effet ces valeurs de base. Il était évident qu’il fallait structurer le Racing dès le CFA, dans la perspective de rejoindre le monde professionnel dans les cinq ans. Nous avons commencé en faisant notamment venir Romain Giraud comme secrétaire général. Concernant la DNCG, nous avions réuni 1,5 million pour bénéficier de son feu vert et entériner la montée en CFA. D’ailleurs, je me souviens bien de cette réunion capitale : il nous manquait 250 000€ par rapport au budget que nous présentions. Cette somme correspondait à l’apport financier de deux de nos actionnaires, Sébastien Loeb et Ivan Hasek. Nous avions avec nous les preuves de leur virement mais, comme ils habitaient tous les deux à l’étranger, les fonds n’apparaissaient pas encore sur notre compte. J’ai donc dû signer un chèque personnel pour pouvoir combler cette absence de fonds… Depuis dix ans, on a su retrouver un gros capital confiance auprès des instances du football français, sur des bases très claires : on a toujours dit ce qu’on ferait et on a toujours fait ce qu’on a dit. Alors oui, dès le départ, on a en effet remis en marche une politique commerciale digne de ce nom. Ce qu’il faut bien comprendre, c’est qu’il n’y avait plus rien autour de nous. Nous avons eu un mal de chien à récupérer quelques bureaux, il n’y avait plus un ordinateur, c’était le désert. Pour illustrer ça, il y a une histoire que je voudrais vous raconter, celle de Dominique Fischer. Dominique avait été l’assistante de Freddy Zix au Centre de formation pendant vingt-cinq ans et elle avait perdu son job après le dépôt de bilan. Cette femme sensible est arrivée dans mon bureau et elle s’est mise à pleurer en racontant tout ce qui venait de se passer au Racing en quelques années. « Comment puis-je aider le club ? » m’at- elle demandé. Je lui ai répondu que je ne savais pas encore jusqu’où on irait, mais qu’elle pouvait collaborer en tant que bénévole. Ma promesse était que le Racing l’embaucherait dès son retour en National. Ce qui fut fait. Depuis, elle est mon assistante au sein du staff du Racing.

Parlons des résultats sportifs maintenant. On ne va pas revenir sur cette fantastique épopée qui a vu le Racing remonter « du fond de la cave » pour échouer d’un rien aux portes de l’Europe. Nous racontons tout cela en détail dans les pages qui suivent. Mais à d’autres moments, sincèrement, y’a-t-il un moment où vous avez eu peur de ne pas y arriver ?

Très sincèrement, jamais. Pas une seule fois !

Vraiment ?

Vraiment. J’ai toujours évité de regarder à quelques jours ou quelques semaines près. À six mois, disons, je savais qu’on pouvait se planter. À court terme, dans le football, on ne peut être sûr de rien. Mais à trois ou quatre ans, j’étais certain que la réussite ne pouvait que venir, à condition de travailler correctement… Notre force a toujours été dans la qualité de l’organisation que nous avons mise en place durant ces dix ans et la qualité des gens. Je suis resté un sportif dans l’âme : quand tu veux gagner un match, il faut très bien se préparer, analyser l’adversaire, mettre une organisation et une stratégie en place pour obtenir le résultat que tu veux. Dans le football, c’est la même chose…

Il y a quand même un élément qui, objectivement, a puissamment aidé, c’est ce merveilleux public strasbourgeois. Durant toutes les étapes de la remontée, la Meinau n’a cessé de battre le record national des affluences. Et, dès le retour au professionnalisme, il n’a pratiquement jamais cessé de faire le plein…

Oui, le public a toujours été là. Le mur bleu, bien sûr, mais le public au sens large du terme, également. Il nous a fourni une vraie énergie à tous, les joueurs, les entraîneurs, les salariés et les dirigeants. Quand tu vis de grandes émotions au stade, ça te donne de l’énergie, c’est certain.

Il y a eu un moment très personnel, presque intime quand François, votre frère, a évoqué franchement devant vous ce qu’il pressentait comme une nécessité, quitter son poste d’entraîneur…

François est venu me voir, un soir, et nous avons discuté. Il m’a longuement expliqué que le moment était venu de tenter quelque chose et, dans son esprit, c’était changer d’entraîneur. Personnellement, je n’en étais pas du tout convaincu parce que je pensais que l’équipe était structurellement en difficulté parce qu’on avait un effectif qui venait du CFA2 et qu’on ne pouvait pas modifier car les contrats des joueurs avaient été négociés dès la première année et se prolongeaient à chaque intersaison. Donc, on savait tous qu’on était dans une saison de grande difficulté, avant de pouvoir un peu rebâtir l’équipe. Sincèrement, je pensais que changer d’entraîneur n’allait pas servir à grand-chose. Mais François, tellement honnête vis-à-vis du club, pensait vraiment qu’il devait passer la main. Je l’ai plus suivi qu’autre chose, mais je n’avais pas cette conviction en moi.

Ce fut un moment dur pour vous…

Oui, très dur. Dur pour lui, dur pour moi. Je l’ai plus fait pour aider mon frère qui ne voulait plus de ce poids. Mais, au fond de moi, je savais que ce n’était pas la solution, en tout cas à ce moment de la saison. Tout de suite, il a évoqué Jacky Duguépéroux pour lui succéder. Nous l’avons joint immédiatement. La preuve que tout cela n’avait rien d’évident, c’est que Jacky n’a pas réussi ensuite à sauver l’équipe sur le terrain. Il fallait reconstruire avec un effectif venant du National… En tout cas, ce genre d’événement et de situation montrent que quand tu es président d’un club c’est que c’est ta responsabilité. À la fin, tu es contraint de prendre les décisions qui s’imposent. En tout cas, celle-ci fait partie de ma vie et de celle de François. Mais quand tu as pris une décision comme celle-là, après il n’y a plus de décision difficile. Bien sûr, je ne suis pas obligé de prendre des décisions tous les jours mais, quand c’est le cas, il y a toujours un élément, essentiel, qui détermine ma position : essayer d’avoir une idée claire sur ce qui est bon ou non pour le Racing. C’est ma seule boussole.

On évoque là un point important. On vous présente volontiers comme quelqu’un d’hyper compétent, droit, toujours au top, qui prend les bonnes décisions. Certains de vos intimes évoquent aussi votre sensibilité. Sur ces dix dernières années, quels sont les moments où, vraiment vos tripes ont réagi, quels sont les moments, positifs ou négatifs, que vous retenez, émotionnellement ?

Il y a eu des pics émotionnels liés à tel ou tel match, bien sûr. Pour moi, à Épinal, ce match qui nous permet de monter en National a représenté un moment incroyable. Idem quand tu montes en Ligue 1, même chose quand tu remportes la Coupe de la Ligue. Et je ne parle pas de l’instant magique et hors du temps du coup franc de Dimitri Liénard dans la lucarne lyonnaise… Ce sont des flashes surpuissants, mais cela reste des instants. Pour moi, le plus grand plaisir est au quotidien. L’émotion, je la ressens à tout moment et pas forcément qu’au stade. Je la ressens quand les gens me disent à quel point le Racing les rend heureux : en dix ans, j’ai eu tellement de témoignages ! Cela peut être une grand-mère, un jeune, une famille quand les gens racontent ce qu’ils ont vécu avec le club. C’est incroyable !

Venons-en à cette dernière saison. Il y a un an, nous aurions évoqué le fait que le club venait d’arracher son maintien lors de la dernière journée et que Thierry Laurey allait quitter le club après cinq saisons plutôt brillantes. Dans quel état d’esprit étiez-vous alors. Quel était votre projet pour la suite de l’aventure ?

Je peux répondre d’une façon très simple car, pour moi, la situation était très claire. Thierry Laurey venait de réaliser cinq saisons formidables, en nous faisant monter en Ligue 1, en nous faisant nous maintenir chaque saison. Une victoire en Coupe de la Ligue a couronné son parcours. Il faut rappeler que Thierry a battu, et largement, le record de longévité d’un entraîneur du Racing ! Effectivement, la dernière saison a été la plus difficile. Cela est dû pour beaucoup à la crise sanitaire que nous avons traversée. Le stade était vide, comme tous les autres en France. Et un Racing, sans son public, sans ses supporters et sans la vie intense de la Meinau, c’est un Racing sans saveur. Pour expliquer également cette saison moyenne, il y a eu aussi ces blessés importants comme Matz Sels et Lebo Mothiba toute la saison, Momo Simakan durant de longs mois. Et puis, on arrivait tout doucement à la fin d’un cycle, je le sentais bien. J’ajouterai aussi que cette année a vraiment été une saison maudite puisque Egon et Patrick nous ont quittés. Alors, si nous nous étions rencontrés il y a un an, au même instant, je vous aurais dit qu’il fallait tenter de réinitier un nouveau cycle après ces cinq années de très bon travail de notre entraîneur. Cette décision, il m’a fallu la maturer petit à petit, elle ne pouvait se prendre en un instant. On était tellement concentrés sur les résultats, journée après journée, on était tellement à la limite. J’ai toujours eu la conviction qu’on finirait par s’en sortir, qu’il fallait garder Thierry jusqu’au bout, de façon à rester unis pour boucler cette saison au mieux, dans un contexte où rien n’allait. On y est parvenus. On a immédiatement rencontré trois entraîneurs potentiels et la décision de recruter Julien Stéphan s’est imposée de façon très logique. Il est jeune, il a des idées et il avait besoin de retrouver un club où il se sentirait bien après sa fin un peu douloureuse à Rennes. On a essayé de le mettre dans les meilleures conditions qui soient. Il est arrivé avec un staff et il travaille main dans la main avec Loïc Désiré qui est un homme très important dans le secteur du recrutement. Le groupe de joueurs a pas mal été remodelé au niveau défensif car il fallait redonner du peps dans ce secteur. Je pensais qu’on pourrait terminer entre la 9e et la 12e place. Finalement, on a fait beaucoup mieux.

©Nicolas Rosès

 

L’arrivée de Kevin Gameiro n’était apparemment pas prévue…

C’est vrai. On s’était rencontrés par hasard aux Internationaux de Strasbourg de tennis et j’avais cru comprendre qu’il y avait moyen de discuter avec lui. Kader Mangane et Loïc Désiré ont entamé des discussions avec ses agents. Il a fallu un mois pour que Kevin mûrisse sa décision et pour que nous consentions cet effort qui n’était pas prévu, non plus. On s’était dit que c’était une bonne idée et, concrètement, ce fut une très, très bonne idée. Sur le terrain d’abord – on savait que c’était un excellent joueur même s’il avait un certain âge – mais aussi en termes de mentalité et d’expérience. Il s’est comporté de façon vraiment remarquable et exemplaire.

On va tenter de vous faire renfiler le short et le maillot du footeux que vous avez été. Ce beau jeu dont le Racing nous a gratifié cette saison, comment l’ex-joueur de haut niveau l’a-t-il apprécié ?

Lors de nos discussions, j’avais dit à Julien Stéphan que l’objectif n’était pas réellement le classement mais que je souhaitais avant tout une équipe dynamique, qui donne beaucoup de plaisir à son public, une équipe qui ne lâche rien, qui joue avec ses moyens, mais qui soit fière et qui rende fière sa région. L’objectif a été atteint, je ne me souviens pas d’une saison où notre plaisir à tous a été aussi grand. Julien a fait un travail remarquable, il s’est bien intégré, son staff aussi… La vraie réussite de cette année, elle est là. Et le classement n’est qu’une indication, rien de plus. On a fini sixième, mais on aurait fini neuvième, j’aurais dit exactement la même chose. Pour moi, ça n’aurait rien changé. Ce qui fait plaisir à voir, c’est une bonne dynamique et un vestiaire uni qui fabrique du bon football.

Enfin, pour finir, quelles sont aujourd’hui les perspectives du Racing ? Peut-il se maintenir au niveau atteint cette saison et si oui comment ? Et comment vous situez-vous dans ce contexte ?

Pour plagier un peu le titre de cette publication, le Racing a réussi une saison hors norme. J’ai toujours dit qu’un club comme le nôtre était calibré pour lutter dans le haut de la deuxième partie du classement. C’est simple, il y a les très gros budgets, Paris, Marseille, Monaco, Lyon. On peut aujourd’hui rajouter des clubs comme Lille mais aussi Rennes, qui peut s’appuyer sur la famille Pinault, ou Nice, qui profite de l’investissement d’Inéos. Et donc, pour moi, une bonne saison, pour le Racing, est une saison où il réussit à terminer entre la 8e et la 12e place.
Il peut arriver, comme en 2021-2022, que quelques gros connaissent une période difficile et que nous soyons très performants. Mais ce n’est pas la norme, je le répète. Nous sommes, aujourd’hui, arrivés à la limite de nos moyens en termes de recettes. Notre stade est plein, nous sommes archipleins sur le plan réceptif. Augmenter le prix des places ? Cela n’entre pas en ligne de compte, c’est notre choix, notre philosophie de club populaire, ancré dans son territoire.
Nous pourrons, lorsque la nouvelle Meinau sera terminée, compter sur un apport de recettes d’une quinzaine de millions d’euros bruts. Mais ça ne gommera pas la différence avec les gros. Si, un jour, on veut annoncer une ambition plus haute, dans le Top 7, il faudra prendre des risques que l’actionnariat actuel ne pourra pas supporter. Cela veut dire simplement qu’un tel projet ne peut s’envisager qu’avec un accompagnement capitalistique de nature à permettre cette ambition.

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