Nathalie Orlat « Il faut renoncer à être parfait et laisser la vie imposer un nouveau rythme »
Le confinement bouscule nos vies, personnelles comme professionnelles. Nathalie Orlat, 36 ans, professeure de yoga freelance, partage avec nous ses craintes mais aussi ses conseils, entre entrepreneuriat et lâcher prise…
ON : Comment vis-tu le confinement professionnellement et comment cette crise impacte-t-elle ton activité ?
Professionnellement, mon activité est mise à zéro actuellement ce qui veut dire que financièrement c’est à zéro aussi. Au final ça me laisse le temps de réfléchir à tout ce sur quoi je n’ai pas le temps de me pencher quand je travaille de manière normale. Cette respiration qui m’est donnée est plutôt bonne à prendre. J’essaie de valoriser cette période pour travailler sur des projets que j’ai en tête, ou que j’ai déjà entamé. Avec mon activité principale stoppée, je me suis rendue compte que du jour au lendemain tout pouvait s’arrêter, tout pouvait disparaitre donc je dois prévoir absolument une deuxième activité en parallèle pour assurer mon futur.
Quelles solutions as-tu mis en place pour faire face à ces changements ?
Il y a eu plusieurs étapes. La première semaine a été consacrée à l’aspect administratif. J’ai reçu des e-mails des clubs, des entreprises, qui disaient que tout s’arrêtait. J’ai eu peur de ne pas être payée, j’ai donc facturé les cours que j’avais déjà faits. La deuxième semaine, quand j’ai vu que de nombreux profs ou clubs faisaient des cours en live, je m’y suis mise aussi et j’ai donc fait des vidéos YouTube pour que ma clientèle puisse pratiquer. Cela permet également de faire venir d’autres personnes, et des clients qui ne me connaissent pas. Très vite je me suis rendue compte que ça prenait énormément de temps. J’ai compris que si je décidais de faire ces lives et ces vidéos, je ne pourrais plus du tout faire avancer d’autres projets en parallèle. Faire une vidéo ça demande à aménager la pièce, à installer des caméras, à faire le cours, à faire la promotion du cours sur les réseaux sociaux, à trouver un logiciel pour faire payer les gens… J’ai fait ça une semaine puis je me suis arrêtée.
Comment envisages-tu la sortie du confinement et le monde d’après ?
Vu mon activité, qui se fait souvent en groupe, la sortie du confinement ne signifiera pas que c’est la reprise. J’ai déjà eu des échos des entreprises, en général les cours s’arrêtent en juillet/aout, donc je ne devrais pas pouvoir reprendre avant septembre. Ça va faire un trou énorme dans ma compta. Je vais donc essayer de trouver plus de cours privés, qui eux seront autorisés. Pendant ce confinement on a pu voir que le digital touchait énormément le monde du yoga, ça peut paraitre complètement bizarre, mais finalement ce type d’expériences s’est développé à distance. Je pense que ce sont des choses qui pourront occasionnellement continuer par la suite, voire même compléter la pratique de yoga en salle. J‘aimerais bien mener une enquête auprès des élèves qui ont pratiqué de cette manière-là, pour voir ce qu’ils ont trouvé de positif et de négatif dans la vidéo et pourquoi pas réfléchir à mettre en place une plateforme pour réunir les lives ou même créer un évènement complètement à part. Là par exemple y a un festival de yoga en ligne qui s’est créé sur 2 jours. C’est une occasion pour pratiquer avec des professionnels du yoga du monde entier !
Quels conseils donnerais-tu aux personnes dans ta situation ?
Même si c’est difficile financièrement, je conseillerais de prendre ce temps pour travailler sur d’autres projets qui peuvent perdurer après le confinement. Être prof de yoga ce n’est pas que donner des cours collectifs, privés ou en entreprises. Il y a plein d’autres taches, c’est un véritable agenda à tenir. Il faut chercher des lectures pour trouver de bonnes inspirations, écrire les cours mais aussi les contenus pour la communication sur les réseaux sociaux. Il faut également organiser des ateliers, trouver des lieux, se vendre auprès des entreprises, contacter des éventuels sponsors. Pourquoi ne pas prendre le temps du confinement pour faire justement tout cela ? Prendre le temps de mieux s’organiser, tout simplement.
As-tu un message pour tes élèves ?
Faites ce qui est bon pour vous ! La situation dans laquelle nous sommes est une expérience inédite où certaines choses peuvent se révéler si on y est attentif. On a été très vite submergé par un tas de propositions pour nous occuper, tout cela était motivé par la peur de l’ennui, de la solitude… Je pense qu’au début on a eu envie de tout faire, mais au fur et à mesure on a tous su s’orienter vers nos vraies inspirations, vers ce qui nous tenait vraiment à cœur. Il ne faut pas hésiter à passer sur un mode contemplatif, arrêter de toujours vouloir garder le contrôle. Il faut renoncer à être parfait et laisser la vie imposer un nouveau rythme.
Le déconfinement pour moi ne sera pas une réelle libération, ma vraie libération ça sera de retrouver mes élèves.
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