Un Alsacien au Japon – épisode 15

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Le plaisir de la langue

 

Cela fait maintenant presque deux mois que vous êtes arrivés. Les premières démarches passées et les habitudes prises, il est grand temps de vous mettre à apprendre le japonais. Oh bien sûr, vous vous en sortez au quotidien, vous bricolez avec l’anglais, vous faites des gestes, vous montrez une photo prise avec votre téléphone, cela suffit pour demander votre chemin dans la rue mais vous vous dites que si un beau matin vous avez mal aux dents, ça ne va pas être simple d’aller voir le dentiste ici !

Il y a déjà votre logeuse à qui vous ne savez pas expliquer que votre boîte aux lettres est coincée, ou le facteur à l’interphone, qui monte quand vous descendez et inversement (si vous ratez le coche, Dieu sait où finira votre colis). Les courses à l’aveuglette vous font toujours rigoler mais vous aimeriez bien varier les plaisirs sans que ça finisse à la poubelle. Pareil au restaurant, heureusement qu’un ami était avec vous pour traduire car vous étiez sur le point de manger de la baleine (ah ça non !). Puis, mis à part l’aspect pratique, vous avez tout simplement envie de pouvoir communiquer avec ce peuple si accueillant, leur dire plus que « bonjour » et « merci », connaître mieux leur culture.

Idéogrammes

C’est décidé, vous vous y mettez à fond. Tous les matins, au petit-déjeuner, c’est cours de japonais. Vous avez acheté une méthode d’apprentissage, trouvé une application sur votre téléphone, cahier, café, la leçon peut commencer. Vous êtes motivé et tant mieux, car il faut s’accrocher. Le système d’écriture du japonais est extrêmement complexe et ses bases doivent être apprises par cœur, pas moyen de faire autrement. Il vous faut ainsi dans un premier temps assimiler pas moins de trois « alphabets » (les hiraganas, katakanas et kanjis) soit plusieurs milliers d’idéogrammes. Heureusement, pour une compréhension quotidienne, quelques centaines suffisent mais il faut tout de même avoir tout ça en tête.

Vous avez l’impression d’être de retour sur les bancs de l’école, vous dessinez vos lignes de signes patiemment en prononçant à haute voix le son correspondant, partagé entre émerveillement et lassitude. Au début de chaque nouvelle leçon vous vous dites que vous avez tout oublié de la précédente et que vous n’y arriverez jamais. Pourtant, au fil des jours, vous retenez certains idéogrammes. C’est votre nouveau jeu dans le métro, essayer de déchiffrer sur les publicités, les signes que vous maîtrisez.

Trinquer au bar et faire rire tout le monde

Le « su », le « i », le « ka », « su-i-ka », bravo, vous savez dire « pastèque »… 🙂 Car oui, déchiffrer ne veut pas dire que vous comprenez ce que vous êtes en train de lire, ce qui complique encore la tâche. Il vous faut donc apprendre le vocabulaire en parallèle, en romaji cette fois (transcription en lettres romaines) afin de faire finalement correspondre son et sens. C’est d’ailleurs l’occasion d’apprendre que zizi se dit « chin » ce qui explique pourquoi cela fait deux mois que vous faites rire tout le monde quand vous trinquez dans un bar.

Certains matins, vous vous dites que Montréal aurait été aussi une chouette destination pour s’expatrier puis vous prenez le métro, et là, alors que la climatisation souffle un froid polaire et que vous essayez de mettre votre veste sans gêner les autres passagers, une main vous aide à enfiler votre manche. Derrière vous, une mamie vous sourit et vous parle, vous comprenez qu’elle s’excuse parce qu’il fait trop froid dans le métro. Vous aimeriez discuter tout le trajet avec elle, lui dire plus que « merci ». Tant pis pour Molière, retour aux kanjis.

 

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