Un Alsacien au Japon – épisode 34

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Lost in translation II

 

Il y a quelques semaines vous avez emprunté une méthode de japonais à la médiathèque et c’est demain le jour où vous devez la rendre. Evidemment, vous n’avez pas eu le temps de finir toutes les leçons et vous décidez donc de photocopier le livre d’autant plus qu’il s’agit d’une ancienne édition très bien faite, mais désormais épuisée. Il est déjà tard, mais vous descendez au Lawson, le kombini en-bas de chez vous, pour y faire des photocopies. Le livre en question fait une centaine de pages et vous y passez du temps ce qui commence à intriguer les deux employés de l’épicerie. Une jeune femme vient d’abord voir si tout va bien, si vous n’avez pas besoin d’aide et vous lui faites comprendre que vous vous en sortez très bien. On vous laisse donc tranquille mais les soupçons ne disparaissent pas pour autant et sous prétexte de ranger les rayons on vient vous surveiller du coin de l’œil. Vous savez bien que « photocopier tue le livre » mais tout de même !

 

Que peut bien leur vouloir cet étrange gaijin ?

Après un bon quart d’heure vous finissez votre travail de faussaire. Sur le point de partir, votre méthode de japonais dans une main et un tas de feuilles dans l’autre, vous êtes pris d’une envie de vous expliquer et interpellez les deux employés derrière leur comptoir. Vous voulez leur expliquer que justement, vous êtes en train d’apprendre le japonais et que bientôt, vous pourrez parler avec eux ! L’ethnologue en vous aurait mieux fait de se taire. Les deux employés sont médusés. Il est tard, vous êtes déjà suspect mais là on ne comprend vraiment pas où vous voulez en venir. Vous montrez le livre, le tendez, la jeune femme vous le prend des mains et commence à le parcourir avec son collègue. En réalité on pense que vous voulez demander quelque chose, que vous ne savez pas comment le dire et qu’ils doivent regarder dans le livre. Vous, vous vouliez juste être gentil, briser la glace en bon voisin. Vous retentez votre explication en anglais, en vain. Ils replongent dans le livre et potassent à la recherche d’un indice sur ce que peut bien leur vouloir cet étrange gaijin ?

Mata né !

Excédé, vous lâchez une phrase en français : « mais je voulais juste vous dire que j’apprends le japonais! ». « Ah, vous êtes français! Je parle un peu français », s’écrit le jeune homme. Et là tout le monde se détend, vous n’êtes plus un sournois fétichiste des photocopieurs. On vous pose tout un tas de questions. On veut savoir depuis quand vous êtes là, pourquoi, quel âge vous avez. Un vrai interrogatoire mais plein de gentillesse. Depuis le temps que vous êtes dans le quartier, on vous avait repéré et c’est l’occasion d’en savoir plus sur le type aux tatouages. On désigne vos motifs du doigt, la demoiselle discute avec son collègue qui vous traduit. Vous avez l’impression d’être un patient devant deux docteurs. On hoche la tête, on pousse des « oh » des « ah » puis une nouvelle question tombe. Quand vous le pouvez, vous risquez un mot de japonais, hebi (serpent), hasu (lotus) ce qui fait rire vos nouveaux copains. On vous rend votre livre en vous souhaitant la bienvenue au Japon, vous sortez en faisant signe de la main, « mata né » (à bientôt).

Une fois dehors, vous vous dites que la barrière des langues dépend surtout de quel côté on se trouve…

 

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