Un Alsacien au Japon – épisode 39
Transports pas communs
Les Japonais ne font rien comme tout le monde, et même en matière de transport ils ont leurs propres standards. Le plus surprenant ce sont leurs voitures, enfin si on peut appeler « voitures » leurs jouets Majorette. Les « Kei Cars » justement, tiennent presque dans votre poche. 1,50m de large pour 2m de haut et 3 de long, ces voitures apparues après -guerre sont partout dans Tokyo. En forme de cube, aux couleurs kawaii, violettes, bleues ou roses, ce sont essentiellement des femmes qui les conduisent et elles s’adaptent parfaitement à l’architecture de la ville (trafic dense, petites maisons et places de parking sur-mesure). Ici d’ailleurs, impossible d’acheter une voiture si on ne montre pas d’abord la preuve qu’on possède un lieu où la stationner. Pas de risque de surnombre et la ville est agréable à vivre, sans véhicules parqués sur les trottoirs et avec une circulation fluide. Les voitures familiales ne sont pas les seules à avoir rétréci au lavage, même les camions de déménagement sont en fait des mini-vans qui en France passeraient pour des véhicules sans permis. Ceci étant, le parc automobile tokyoïte ne se résume évidemment pas qu’à des pots de yaourt colorés et il vous arrive souvent de voir passer en trombe des Lamborghini ou des Ferrari.
À leur guidon les mamans sont les reines de la ville
Il existe un autre véhicule propre au Japon et aux étranges mensurations : le vélo. Attention, on ne parle pas ici du vélo-ville commun. On parle d’un véritable char d’assaut, l’arme de toutes les mères de famille. Imaginez un vélo de 3m d’envergure, avec paniers et sièges pour enfant à l’avant et à l’arrière, le tout avec assistance électrique, commandes électroniques et même une béquille centrale. À leur guidon les mamans sont les reines de la ville, elles transportent courses et marmaille et se faufilent entre les passants en fusant sur les trottoirs, mieux ne vaut pas être sur leur passage, coup de sonnette garanti ! Pour stationner ces engins, pas de souci, il existe carrément des parkings souterrains robotisés qui saisissent et stockent le vélo automatiquement.
Plus conventionnels mais avec un style là encore bien à eux, les taxis japonais sont le summum de la classe. Après que la porte automatique ce soit ouverte vous pénétrez dans une ambiance feutrée avec napperons sur les siège et rideaux aux vitres. On vous accueille en gants blancs et tout en politesse pour une course silencieuse et rapide. En revanche, si la discussion est lancée et que l’on comprend que vous êtes Français, il est très probable que vous ayez droit à une reprise a capella d’un tube des années 80 (Joe Dassin ou Michel Sardou au choix), la qualité du service en prend un coup !
Passion train
En terme de transport, la grande fierté des Japonais, c’est leur train ultra rapide, le Shinkansen. Avec son wagon de tête en forme de bec de canard et ses 320km/h au compteur, c’est une véritable star. Peluches, jouets et même plateaux-repas reprenant son look atypique, il est le chouchou des petits et des grands. Cette passion des trains s’étend d’ailleurs au reste du réseau ferroviaire et les trains classiques voire même les métros font l’objet d’un véritable culte (il existe même un bar où vous pouvez déguster des cocktails aux couleurs des lignes de métro). Là encore, on trouve tous les produits dérivés possibles mais aussi des albums qui reprennent les annonces de chaque station. Il existe même des fans inconditionnels qui vont jusqu’à se spécialiser dans le vol d’uniformes d’employés. Ici être conducteur de train est un métier de rêve. Vous, vous vous contentez d’apprécier leur ponctualité et regardez attendri les enfants faire signe aux employés qui ne manquent jamais de leur répondre.
Au Japon les aires d’autoroutes sont de véritables lieux de villégiatures
Mais pour en revenir aux voitures, il y a plus surprenant encore. La semaine dernière vous êtes sortis boire un verre avec des amis Japonais et courant de soirée avez évoqué avec eux leurs projets pour le week-end. Certains parlaient de visiter de la famille, d’autres d’aller essayer un nouveau restaurant de ramen, vous vous pensiez aller voir un temple en périphérie de la ville mais un de vos amis avait la palme de l’amusement : il avait prévu d’aller sur une aire d’autoroute …
Sur le moment vous vous êtes dit qu’une fois encore, entre votre japonais et leur anglais, vous aviez dû mal comprendre ; la vision d’une station-service et d’un parking vous évoquait difficilement un pur moment de bonheur. L’assistance en revanche était conquise et pressait de questions l’aventurier des itinéraires bis. Effectivement, il parlait bien d’une destination au milieu de nulle part, le long d’une quatre voies, mais rien à voir avec nos arrêts-pipi et nos club sandwichs dans un blockhaus sans âme. Au Japon les aires d’autoroutes sont de véritables lieux de villégiatures. Hôtels avec piscine et onsen, magasins, restaurants, mini-golfs et même parcs d’attractions : un centre de loisirs à portée de glissière ! Devant votre moue incrédule on vous propose évidement d’être de la partie mais voilà, vous aviez prévu d’aller visiter le temple dédié à Enma le dieu des Enfers et vous ne voudriez pas vous attirer ses foudres. On ne risque pas la damnation pour une partie de mini-golf.