Un Alsacien au Japon – épisode 58
Un ado à Tokyo
Vous l’avez vite découvert, les mois d’avril-mai sont ceux des visites. À la sortie de l’hiver et avant la chaleur écrasante de l’été, c’est ce moment que choisissent la majorité des gens pour débarquer au Japon. Pendant quelques semaines, vous endossez donc le rôle de guide et ne comptez plus les aller-retour à l’aéroport. Si revisiter les sites incontournables peut paraître lassant, cela reste finalement toujours un plaisir de faire découvrir aux gens que vous aimez cette culture japonaise qui vous fascine tant. Vous apprenez à prendre en compte les velléités de chacun, et essayez de répondre à leurs envies et autres habitudes. Vous trouvez du beurre et de la confiture pour ceux qui veulent conserver un petit déjeuner à la française, des coins fumeurs pour une pause cigarette, un lieu où participer à une cérémonie du thé, etc. Les adultes ont tous plus ou moins la même idée des vacances et avec votre programme type vous arrivez à contenter tout le monde. Avec un adolescent c’est différent…
l’ado a de toute façon déjà tout vu sur Youtube, en réalité, il est là pour vérifier ce qu’on lui a raconté
Fraîchement débarqué et n’ayant pas dormi dans l’avion, il prend soin de rattraper 15h de sommeil au risque de se lever en pleine nuit et ce malgré vos conseils. Le ton est donné pour la semaine car même au bout du monde, on ne réveille pas un ado avant 11h surtout s’il est en vacances ! En revanche, une fois debout, il est infatigable et le soir, c’est vous qui vous endormez presque à table. Une fois lancé, rien ne le fera rentrer donc, si ce n’est l’état de la batterie de son smartphone. Sans Internet la terre s’arrête de tourner. Il faut dire que cette jeunesse hyper-connectée est aussi très alerte. Le système du métro qui vous aura demandé plusieurs mois d’adaptation (avec encore des ratés aujourd’hui) est assimilé en même pas 5 minutes, le temple dont vous ignorez le nom est remis illico presto dans son contexte historique et le menu au restaurant instantanément traduit. S’il est vrai que vous faites pâle figure à côté de Google, vous arrivez tout de même à sortir votre épingle du jeu en trouvant des boutiques spéciales et des achats originaux, de quoi faire envier les copains une fois rentré. Pour le reste, l’ado a de toute façon déjà tout vu sur Youtube, en réalité, il est là pour vérifier ce qu’on lui a raconté. Plus inspecteur des travaux finis qu’ethnologue, l’ado reste touchant et il faut avouer que vous apprenez beaucoup à ses côtés (même si au passage vous prenez un sacré coup de vieux). Emissions à la mode, marques de vêtements à arborer, séries à voir absolument, tout cet autre univers et surtout cet entrain vous font sourire, vous rappelant que vous aussi, vous avez un jour farci la tête de vos parents. Des musées où on rentre à reculons aux grands magasins où l’on ne veut plus sortir, la semaine file.
mais tous les copains vont me demander…
La veille du départ, en fin de journée, c’est la dernière volonté : aller dans un café à chat. Interloqué, vous lui demandez pourquoi il veut aller boire un café entouré de félins apathiques (alors qu’il en a deux qui attendent sagement son retour en France). Réponse implacable : « mais tous les copains vont me demander si j’ai vu un café à chat!« . Vivement qu’eux aussi viennent au Japon !